Accéder au contenu principal

Mutant !


Tiens, ça faisait longtemps que je ne m'étais pas fendu d'une rediff de vieil article. Celui-ci est sorti dans le n°18 de Fiction (nouvelle formule) vers 2013 (déjà) et était consacré à la figure classique du Mutant.


Extrait d'un Mechanics Illustrated
(Notons que c'est la première fois que Wolverine
se fait allumer par Cyclope, bien avant la création des deux personnages)


Le Mutant

En cette époque où Fukushima et autres fuites radioactives conduisent à repenser radicalement la pêche, l’agriculture et la notion même de comestible, et où de grandes multinationales réécrivent le génome de bêtes grains de maïs qui finissent dans nos assiettes, ce terme inquiétant pourrait redevenir d’actualité. Mais actualité ne veut pas dire nouveauté.
Car le mutant a été très tôt un des concepts clés de la science-fiction, même s’il n’était pas forcément nommé dès le départ (et même si la science-fiction elle-même ne portait pas encore de nom à l’époque). L’épouvantable peuplade souterraine des Morlocks, dans la Machine à explorer le temps d’H.G. Wells (1895), est probablement une population d’origine mutante, en voie de devenir une espèce séparée de l’humanité. Et les Elois, s’ils ont l’air plus humains, semblent affadis, affaiblis, dégénérés d’une autre manière, peut-être plus insidieuse, et représenter une impasse évolutive. Par la suite, une fois le vocable popularisé, le mutant est devenu un thème sur lequel bâtir des romans entiers, comme À la poursuite des Slans (A. E. Van Vogt, 1940) ou Les plus qu’humains (Theodore Sturgeon, 1953), voire des séries de comics au long cours (Uncanny X-Men, qui dure depuis cinquante ans et a généré six films, bientôt sept, et plusieurs séries de dessins animés).
Au même titre que l’extraterrestre ou le robot, le mutant est membre de plein droit du bestiaire de la science-fiction. Parfois surhumain, parfois vu comme sous-humain ou post-humain, il est surtout différent.
Le mutant, c’est une variante de la confrontation à l’autre, une variante d’autant plus inquiétante qu’elle est proche, qu’elle se fonde sur un décalage parfois infime. Le mutant, c’est l’autre issu du même. Cela peut être le fils du voisin, voire votre propre enfant, porteur d’un gène qu’aucun de ses parents ne lui a transmis. Ce qui le rend aussi fascinant que dérangeant.
Mais si le terme a quelque chose de stigmatisant (cette intolérance est même le thème central autour duquel tournent toutes les séries liées aux X-Men, dans lesquelles les mutants se font symboles de toutes les minorités), que recouvre-t-il au juste ?
On appelle « mutant » un individu biologique portant des caractéristiques qu’il n’a hérité d’aucun de ses parents, et d’aucun de ses ancêtres. Et techniquement, le fils d’un mutant portant la même caractéristique inhabituelle que son géniteur n’est donc plus un mutant. Mais il sera souvent considéré comme tel par les « normaux » de son entourage. Pour en revenir à notre premier exemple, les ancêtres des Morlocks étaient indubitablement des mutants, mais les créatures que rencontre le héros voyageur d’H.G. Wells sont tout à fait normales dans leur propre contexte. La mutation a été dûment « digérée » au fil des générations. Un généticien dirait que les gènes ont été « fixés », et on est peut-être en face d’un processus de spéciation, c’est-à-dire de séparation d’une nouvelle sous-espèce à partir du tronc commun « normal » de l’humanité et à terme, peut-être, d’une nouvelle espèce tout court.

Dessin de Brent Anderson pour God Love, Man Kills ©Marvel


Mutatis, mutandis

Toujours est-il que, sous une forme ou une autre, le mutant est un ingrédient de choix de la science-fiction. On ne compte plus les mutants apparaissant par exemple dans les récits post apocalyptiques, ils sont même quasiment un des passages obligés, voire un des clichés du genre.
L’intérêt du mutant en tant qu’élément dramatique d’un récit c’est sa capacité à endosser des symboliques diverses. On l’a dit, le mutant c’est l’autre qui est presque le même, il peut se faire métaphore du racisme et c’est déjà le cas dans À la Poursuite des Slans. Mais il est aussi un moyen de traiter de toutes les discriminations : travaillant sur l’adaptation cinématographique des X-Men, le réalisateur Brian Singer et l’acteur Ian McKellen ont confié qu’ils y voyaient aussi un moyen de faire avancer la cause des droits homosexuels, qui leur tient particulièrement à cœur quand, dans les années 1960, c’est l’aspect racial des problèmes sociaux qui était passé à la moulinette, le discours du terroriste Magneto n’étant pas sans évoquer celui de groupes radicaux noirs comme les Black Panthers, ou de la Nation of Islam.
Par ailleurs, la découverte des pouvoirs et de sa différence par un jeune mutant devient facilement une métaphore des affres de la puberté et de ce sentiment lancinant d’être seul et incompris. Le poids des pouvoirs, parfois écrasant, permet d’évoquer la solitude et les responsabilités de leur porteur. Et leur disparition permet aisément d’évoquer le mal-être et la crainte d’une mort symbolique en forme de castration, comme dans l’Oreille interne, de Robert Silverberg (1972). Dans ce roman devenu depuis un classique du genre, David Selig est doué de pouvoirs télépathiques. Il peut, sans effort de sa part, et même sans intention consciente, percevoir les pensées de ceux qui l’entourent, un pouvoir bien pratique mais qui ne lui permet pourtant pas d’échapper à une certaine forme de médiocrité, et qui devient donc graduellement un poids, une gêne. Mais quand ce pouvoir commence à connaître des ratés, puis à s’estomper, Selig n’y voit pas une libération, mais une amputation, tant on ne se rend pas forcément compte de ce qu’on a, jusqu’à ce qu’on le perde. Que Selig soit un mutant, pas forcément le seul de son espèce, mais largement isolé dans la population des « normaux » l'empêche de fait de trouver une solution à la perte inéluctable de ses facultés.
À ce propos, si le motif des « pouvoirs psy » recoupe celui du mutant, il ne lui est pas totalement superposable. Déjà parce que si la mutation génétique est un concept connu et dont le fonctionnement est globalement compris, le pouvoir psy est un tout autre animal. On n’a jamais prouvé l’existence de la précognition, de la télépathie ni de la télékinésie, malgré bien des efforts qui ont été consacrés à ce sujet depuis des décennies. De fait, on ignore totalement si une variation génétique pourra jamais produire des professeurs Xavier ou autre télépathes, ni des prophètes absolus comme Carvajal (personnage central de L’homme stochastique de Robert Silverberg, publié en 1975).
Autre motif qui recoupe par endroit celui du mutant, le « surhomme ». C’est bien entendu souvent cet angle qui est préférentiellement choisi dans les comic books mais, évidemment, tous les surhommes ne sont pas des mutants. Par contre, l’image du surhomme permet de traiter le mutant comme stade suivant de l’évolution humaine, ce qui permet de mettre en perspective l’humanité elle-même, et surtout les qualités et défauts qui font d’elle l’humanité. Le surhumain, à force de dépasser nos limites, est-il encore humain ? Le thème est à peu près aussi vieux que l’épopée de Gilgamesh, mais il est loin d’être épuisé.

Les superpouvoirs, c’est simple comme un coup de mutation

Mais au fait, pourquoi et comment le mutant acquiert-il sa différence ? Dans le cadre du récit, on se contente bien souvent et faute de mieux de faire comme si c’était acquis. Car la cause, le pourquoi, est rarement le sujet. La « mutation » devient alors une explication commode et parfois implicite, une baguette magique, c’est le principe de la « voyante de naissance » dont on vous distribue la carte à la sortie du métro (mais donc pas, on l’a vu, celui du « marabout de père en fils »). Et très souvent, donc, la qualité de mutant est un présupposé se passant d’explication supplémentaire. C’était par exemple l’approche de Stan Lee au moment de la création des X-Men : après avoir expliqué les origines d’Iron Man, Hulk, les Fantastiques, Spider-man ou Thor, la tête pensante des Marvel Comics décidé de se contenter de la qualification de « mutants » pour justifier de l’existence de la petite troupe réunie par le Professeur Xavier en 1963, sans avoir à inventer une histoire complexe à chacun de ses personnages*.
Force est de reconnaître du coup que cette facilité peut nuire au sujet. Comme toute baguette magique narrative de ce genre, l’abus conduit à l’inflation, et l’inflation à la dévaluation. Trop de personnages sont regroupés sous l’étiquette « mutants » sans en être vraiment, comme les fameuses Tortues Ninja (en VO, Teenage Mutant Ninja Turtles, les tortues ninja mutantes et adolescentes) ou le Toxic Avenger.
Certes, une définition purement scientifique du mutant peut sembler très restrictive, mais c’est un faux problème. Replier le mutant sur une définition stricte peut conduire à redéfinir les concepts de ses petits frères et à ouvrir de nouvelles pistes, à créer de nouveaux motifs autonomes. Et se concentrer sur elle, c’est pourquoi pas essayer d’en tirer la substantifique moelle, de lui apporter des éclairages nouveaux.

Où y a du gène…

Mais si l’on veut vraiment se pencher de plus près sur le sujet, il est intéressant aussi de voir ce qu’est vraiment une mutation génétique.
Ce que code concrètement un gène, ce n’est pas un comportement ou un pouvoir, mais une protéine, n’en déplaise à ceux qui nous sortent des gènes de la violence, de la bosse des maths ou de l’homosexualité. Une mutation est généralement la permutation ou la modification d’une séquence d’un gène, conduisant parfois à une modification de la formule ou de la forme de la protéine qu’il était censé produire (on ne rentrera d’ailleurs pas ici dans le processus qui permet de passer du gène codant à la protéine qu’il code, c’est effroyablement compliqué).
Pour des mécanismes complexes, ce sont des combinaisons de plusieurs gènes, parfois de plusieurs dizaines de gènes qui sont impliquées, sans d’ailleurs que l’on ne comprenne ni ne maîtrise tout à fait leurs interactions à ce stade : tel gène peut coder une protéine fondamentale construisant l’organisme, tel autre une enzyme qui modifiera la protéine en question, et un troisième un anticorps qui permettra de moduler précisément les conditions de l’action de l’enzyme. Et ainsi de suite.
Les expériences menées sur des poules pour réveiller des gènes dormants l’ont démontré : un gène seul ne peut fonctionner correctement que si ceux avec lesquels il est en relation d’interdépendance fonctionnent de façon coordonnées. Dans le cas de nos poules, on a retrouvé le bloc des gènes codant tout ce qui concernait la dentition, hérité de lointains ancêtres dinosauriens**, mais inactivé par l’évolution, probablement à l’occasion d’une mutation, d’ailleurs. « Réveiller » ces gènes qui ne servaient plus depuis des milliers et des milliers de générations était tout à fait à la portée de nos généticiens, qui s’y sont donc employés, avec succès. Mais si ces poules ont des dents, elles sont loin de pouvoir s’en servir : poussant dans un bec qui a évolué sans elles pendant une petite centaine de millions d’années, ces quenottes sont grotesques, plantées dans tous les sens, inutilisables et pire, elles empêchent l’oiseau de se servir correctement de ses caractères normaux.
En ce qui concerne les causes, on en connaît certaines, qui vont de la radioactivité aux rayons cosmiques (dans les périodes où la ceinture de Van Allen nous protège moins) en passant par certaines substances chimiques, et aussi par la fragilité des gênes eux-mêmes lors de leur réplication, ce qui peut générer des erreurs de copie.
Le mutant, c’est donc la résultante de ces erreurs généralement fortuites, c’est l’incarnation du hasard face à la nécessité aveugle, c’est le grain de sable, l’image du droit à la différence dans une société de plus en plus normative, où la différence n’a plus le droit de s’exprimer que par le biais de tribus et de communautés tout aussi normatives.

Dans un processus évolutif discret (au sens normal du terme, hein) mais continu (oui, parce que s’il ne l’était pas, il serait discret au sens scientifique du terme, mais ça nous éloigne de notre sujet, en fait), le mutant est à la fois passé et avenir de l’humanité, à la fois l’autre et le même.
Le mutant, c’est un miroir très légèrement déformant. Et donc d’autant plus dérangeant. Et d’autant plus intéressant.



* Il est assez probable qu'il ait chipé les deux tiers de ses idées dans l'article « how can radiation change our race », d'Otto Binder, illustré par Kurt Shaffenberger. On y trouve déjà d'ailleurs la notion de sous espèce appelée homo superior.

** Eh oui, le poulet de Bresse est un des héritiers des dinosaures, mais une partie de l'héritage a été dilapidée en route, semble-t-il.

Commentaires

soyouz a dit…
Merci.
Chose étrange, l'extrait du Mechanics Illustrated, je l'ai déjà vu quelque part, dans un article également ...
Alex Nikolavitch a dit…
Sans doute dans un article sur les sources des XMEN
Et Morrison fait un truc autour d'un article similaire (inventé) qui sert de base à l'esthétique de Quentin Quire dans Riot at Xavier
soyouz a dit…
Oui, peut être.
Tu ne l'as pas utilisé dans un de tes bouquins ?
Alex Nikolavitch a dit…
il me semble pas. mais c'est peut-être l'oncle Jimbo, alors
soyouz a dit…
Arf, ouais, peut être.
ou alors d'un article de Comic Box, va savoir.

Encore merci pour le partage de ton texte.

Posts les plus consultés de ce blog

Perte en ligne

 L'autre soir, je me suis revu Jurassic Park parce que le Club de l'Etoile organisait une projo avec des commentaires de Nicolas Allard qui sortait un chouette bouquin sur le sujet. Bon outil de promo, j'avais fait exactement la même avec mon L'ancelot y a quelques années. Jurassic Park , c'est un film que j'aime vraiment bien. Chouette casting, révolution dans les effets, les dinos sont cools, y a du fond derrière (voir la vidéo de Bolchegeek sur le sujet, c'est une masterclass), du coup je le revois de temps en temps, la dernière fois c'était avec ma petite dernière qui l'avait jamais vu, alors qu'on voulait se faire une soirée chouette. Elle avait aimé Indiana Jones , je lui ai vendu le truc comme ça : "c'est le mec qui a fait les Indiana Jones qui fait un nouveau film d'aventures, mais cette fois, en plus, y a des dinos. Comment peut-on faire plus cool que ça ?" Par contre, les suites, je les ai pas revues tant que ça. L

IA, IA, Fhtagn

 En ce moment, je bosse entre autres sur des traductions de vieux trucs pulps apparemment inédits sous nos latitudes. C'est un peu un bordel parce qu'on travaille à partir de PDFs montés à partir de scans, et que vu le papier sur lequel étaient imprimés ces machins, c'est parfois pas clean-clean. Les illustrateurs n'avaient  vraiment peur de rien Par chance, les sites d'archives où je vais récupérer ce matos (bonne nouvelle d'ailleurs archive.org qui est mon pourvoyeur habituel en vieilleries de ce genre, semble s'être remis de la récente attaque informatique qui avait failli m'en coller une. d'attaque, je veux dire) ont parfois une version texte faite à partir d'un OCR, d'une reconnaissance de caractère. Ça aide vachement. On s'use vachement moins les yeux. Sauf que... Ben comme c'est de l'OCR en batch non relu, que le document de base est mal contrasté et avec des typos bien empâtées et un papier qui a bien bu l'encre, le t

Au nom du père

 Tout dernièrement, j'ai eu des conversations sur la manière de créer des personnages. Quand on écrit, il n'y a dans ce domaine comme dans d'autre aucune règle absolue. Certains personnages naissent des nécessité structurelle du récit, et il faut alors travailler à leur faire dépasser leur fonction, d'autres naissent naturellement d'une logique de genre ou de contexte, certains sont créés patiemment et se développent de façon organique et d'autres naissent d'un coup dans la tête de leur auteur telle Athéna sortant armée de celle de Zeus. Le Père Guichardin, dans les Exilés de la plaine , est un autre genre d'animal. Lui, c'est un exilé à plus d'un titre. Il existe depuis un sacré bail, depuis bien avant le début de ma carrière d'auteur professionnel. Il est né dans une nouvelle (inédite, mais je la retravaillerai à l'occasion) écrite il y a plus d'un quart de siècle, à un moment où je tentais des expériences d'écriture. En ce temp

En passant par l'Halloween avec mes gros sabots

 Marrant de voir que, si Halloween n'a pas forcément pris sous nos latitudes dans sa forme canonique, avec des hordes d'enfants quêtant les bonbons (j'en croise chaque année, mais en groupes clairsemés et restreints), on voit par contre fleurir dans les semaines qui précèdent les Top 5, 10 ou 50 de films d'horreur, les marathons des mêmes et ainsi de suite. Ce qui est marrant c'est de voir dans le lot des trucs comme The Purge/American Nightmare , qui ne sont pas basés sur le surnaturel, mais dont le côté carnavalesque colle bien à la saison. Je suis pas preneur de la série, pas plus que des Saw , parce que ça m'emmerde un peu, tout comme à force les histoires de serial killers en série. Je suis retombé y a quelques semaines sur le Hannibal de Ridley Scott et si j'aime le casting, si plastiquement y a de très belles choses, c'est un film qui m'ennuie passablement et que je trouve vain. Alors que j'aime bien la série avec Mads Mikkelsen, le film

Noir c'est noir. Ou pas.

 Je causais ailleurs de l'acteur Peter Stormare, qui jouait Czernobog (ou Tchernobog, ou Crnobog, prononcer "Tsr'nobog" dans ce dernier cas) dans la série American Gods , mais qui était aussi Lucifer dans le film Constantine et le nihiliste qui veut couper le zizi du Dude.   de nos jours, il lui latterait plutôt les roubignoles au Dude Tchernobog (ou Czernobog, ou Crnobog) c'est un dieu classique des mythologies slaves, sur lequel il a été beaucoup écrit, un dieu noir et hivernal opposé à la lumière, enfermé dans un cycle de mort et de résurrection, avec donc un rôle dans la fertilité. C'est sur ce mythe-là que Gaiman base son personnage dans American Gods , justement. Les chrétiens l'ont immédiatement assimilé à un diable, et c'est la lecture qu'en fait Disney dans le segment "La nuit sur le Mont Chauve" dans Fantasia .   J'entends cette image   Faut dire que le gars est pas aidé : son nom signifie précisément "dieu noir"

Matin et brouillard

On sent qu'on s'enfonce dans l'automne. C'est la troisième matinée en quelques jours où le fleuve est couvert d'une brume épaisse qui rend invisible le rideau d'arbres de l'autre côté, et fantomatique tout ce qui est tapi sur les quais : voiture, bancs, panneaux. Tout a un contraste bizarre, même la surface de l'eau, entre gris foncé et blanc laiteux, alors qu'elle est marronnasse depuis les inondations en aval, le mois dernier. Une grosse barge vient de passer, j'entends encore vaguement dans le lointain son énorme moteur diesel. Son sillage est magnifique, dans cette lumière étrange, des lignes d'ondulations obliques venant s'écraser, puis rebondir sur le bord, les creux bien sombre, les crêtes presque lumineuses. Elles rebondissent, se croisent avec celles qui arrivent, et le jeu de l'interférence commence. Certaines disparaissent d'un coup, d'autres se démultiplient en vaguelettes plus petites, mais conservant leur orienta

Bouillie

 C'est suivant mon état de fatigue que je me souviens plus ou moins bien de mes rêves. Là, je suis sur deux gros boulots (un de rédactionnel, un d'édition), plusieurs petits (de traduction, de révision de vieux boulots), plusieurs ponctuels (des ateliers passionnants) avec plusieurs événements qui soufflent le chaud et le froid, je jongle entre plein de trucs. Pas la première fois que ça m'arrive, rien d'inquiétant à ce stade, j'avance sur tout en parallèle, selon le principe qu'une collègue a qualifié de "procrastination structurée". Si je cale sur un truc, j'avance sur le suivant, jusqu'à caler, à passer à celui d'après et ainsi de suite jusqu'à avoir fait le tour.  Le signal d'alerte principal, quand je tire trop sur la queue du mickey, c'est quand je lâche tout pour faire un truc sur lequel je procrastinais vraiment depuis des mois, genre faire de la plomberie ou de l'enduit, ou me remettre à écrire de façon compulsive a

Deux-ception

 C'est complètement bizarre. Je rêve de façon récurrente d'un festival de BD qui a lieu dans une ville qui n'existe pas. L'endroit où je signe est dans un chapiteau, sur les hauteurs de la ville (un peu comme la Bulle New York à Angoulème) mais entre cet endroit et la gare routière en contrebas par laquelle j'arrive, il y a un éperon rocheux avec des restes de forteresse médiévale, ça redescend ensuite en pente assez raide, pas toujours construite, jusqu'à une cuvette où il y a les restaus, bars et hôtels où j'ai mes habitudes. L'hôtel de luxe est vraiment foutu comme ça sauf que la rue sur la droite est en très forte pente Hormis l'avenue sur laquelle donne l'hôtel de luxe (où je vais boire des coups dans jamais y loger, même en rêve je suis un loser), tout le reste du quartier c'est de la ruelle. La géographie des lieues est persistante d'un rêve à l'autre, je sais naviguer dans ce quartier. Là, cette nuit, la particularité c'ét

Qu'elle était verte ma vallée

 Un truc intéressant, quand on anime (ou co-anime) des ateliers de prospective dans un cadre institutionnel, c'est qu'on a l'occasion de causer avec des gens de profils très différents, travaillant dans des cadres parfois opposés. L'un des gros sujets évoqués, ce sont les conséquences du changement climatique au niveau environnemental et humain. Et les adaptations nécessaires. Oui, Mad Max est une possibilité d'adaptation Pas la plus positive, ceci dit   Là, tout dernièrement, j'ai croisé dans ce cadre des gens du monde associatif, du travail social et du travail sur l'environnement. Lors d'un travail préliminaire, on a essayé de situer chacun sur un gradient de pessimisme quant à l'avenir. Les gens du monde associatif et les travailleurs sociaux étaient étonnamment optimistes. Ils voient quotidiennement toutes sortes de bonnes volontés, un intérêt croissant et de mieux en mieux informé sur ces questions. Ils ont conscience de l'énorme travail qu

Sorties

Hop, vite fait, mes prochaines sorties et dédicaces : Ce week-end, le 9 novembre, je suis comme tous les ans au Campus Miskatonic de Verdun, pour y signer toute mon imposante production lovecraftienne et sans doute d'autres bouquins en prime.   Dimanche 1er décembre, je serai au Salon des Ouvrages sur la BD à la Halle des blancs manteaux à Paris, avec mes vieux complices des éditions La Cafetière. Je participerai également à un Congrès sur Lovecraft et les sciences, 5 et 6 décembre à Poitiers.