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Writever juin, part 2

Hop, la part 2 du Writever de ce mois-ci où l'on continue en mode "professeur Jones". Apparemment c'est de saison.
 


16.
Il en est du sphinx comme du sourire de la Joconde, on en a tellement fait une énigme en soi que tout chez lui devient mystérieux ou sujet d'interprétations, voire de réinventions plus ou moins acrobatiques.
À part chez les fans de comics lorsqu'ils décryptent leurs illustrés préférés devant des néophytes, on rencontre rarement des gens aussi obsessionnels.
Les fans du sphinx sont les premiers geeks de l'histoire.

 

17.
Les célèbres mosaïques du palais de Plahensos, réputées dans tout le monde antique, avaient été ventilées façon puzzle par les millénaires et les tremblements de terre fréquents dans la région. On avait les pièces, une description par un auteur antique, et une IA générative. Elle tenta toutes les permutations possibles, sans rien trouver de satisfaisant, à part un portrait authentique d'Agamemmnon, les chiffres du loto du surlendemain, le 99e nom de Dieu et une élégante séquence fractale.

 

18.
Établir la chronologie des consuls de Gloumouk n'avait rien de simple : le calendrier se calait sur le nom de l'un des deux titulaires, mais les contestations régulières faisaient que les chroniqueurs adoptaient l'un ou l'autre, voire celui des usurpateurs ou des dissidents. Comme personne n'avait pris soin de dresser une liste complète, c'était un foutoir invraisemblable. On finit par décider que la cité état de Gloumouk, empêtrée dans ses luttes intestines, n'avait pas d'intérêt particulier.


19.
La planète Nethernia était couverte de mausolées gigantesques bâtis dans des styles architecturaux archaïque provenant de toute la galaxie. On parvint à dater ces constructions avec une relative précision et on en déduisit que le dernier des dieux stellaires était né avant l'apparition de l'homme. Notre espèce n'était qu'un accident biologique.


20.
Les Romains jetaient les amphores inutilisables après usage sur le mont Testaccio (qui était une vallée, au départ, mais ça s'est un peu accumulé).
La civilisation des Biguebeauces les recyclait différemment : les tessons servaient de bourre dans les murs épais. On coulait du plâtre dessus et hop. Bon, des fois, sous les tessons les archéologues retrouvent un ennemi familial, l'amant d'une femme de sénateur, une tante à héritage, etc...


21.
C"'était encore une de ces cultures où le bête bouton pour les vêtements violait on ne sait combien de prescriptions morales et religieuses. On s'habillait à l'aide d'un système de fibules qu'il fallait une demi-heure pour mettre en place tous les matins, en évitant de se blesser, même les lendemains de cuite.
Les archéologues considère que la conjonction de cette obligation de la fibule et de l'introduction des spiritueux après l'invention de l'alambic ont conduit à l'effondrement de cette société en moins de deux générations.


22.
Le problème des glyphes gloumouks, c'est qu'ils semblaient parfaitement figuratifs, mais ne représentaient en général que des concepts, par analogie. Ils constituaient donc une sorte de rébus non plus phonétique, mais dialectique, un cheminement mental abstrait. Le premier philologue à entrevoir cette clé sombra dans l'alcool et la consommation de champignons frelatés. L'investigateur qui décrypta ses notes laissa tomber pour aller élever le fromage de chèvres dans le Larzac.


23.
La définition d'un mégalithe, normalement, c'est simple : un caillou plus ou moins taillé mais bien énorme, délibérément installé quelque part.
Mais que dire des pierres dressées des lilliputiens ? à leurs yeux, elles sont cyclopéennes et les installer demande la collaboration de centaines d'entre eux. aux nôtres, les trucs ont des dimensions admissibles pour les prendre avec soi en cabine.

 

24.
Le gros problème, c'est ce réflexe pavlovien des archéologues. Ils trouvent un sarcophage quelconque, il faut qu'ils l'ouvrent pour savoir ce qu'il y a dedans. Les autres scientifiques ont eu beau leur proposer scanners, IRM et détecteurs de muons, non, il faut que chaque découvreur soit le premier à poser les yeux sur l'immémorial contenu.
Alors, quand ils ont commencé à explorer les tombeaux des Nécromants de Crno...


25.
La poésie Blouzouk était fait de métaphores intriquées, basées sur des mythes à demi oubliés, concernant des créatures pour la plupart disparues.
Le problème, c'est que le moindre archiviste ou chroniqueur monastique voulait faire de l'histoire de la chute de cheval du baronnet une épopée en vers.
Les philologues ont abandonné toute idée d'interpréter les chroniques blouzoukes.
Par contre, ces textes très chantants et musicaux ont tous été adaptés par des musiciens.
Même la Geste en 1200 vers concernant la fistule du roi Grondulf.


26.
L'analyse des cendres est un outil majeur de l'archéologie depuis qu'on peut analyser en profondeur ce qui a brûlé.
Mais depuis qu'on a pu identifier 125 hamsters différents dans les reliques de Jeanne d'Arc, les scientifiques s'interrogent.


27.
Nommer les époques selon des métaux avait semblé une bonne idée au départ. Or, argent, bronze, fer... il y avait là une progression assez logique sur le plan symbolique. C'est après que ça s'est gâté. La colère divine ne venant toujours pas mettre fin au monde, il fallut y ajouter les âges de plomb, zinc, laiton, titane, étain, au petit bonheur la chance...

 

28.
Le riche mobilier funéraire de la tombe 417, attribuée au roi Artagkelalarékrès, enflamma les imaginations sur la munificence de sa cour. Puis la découverte et le déchiffrage des chroniques d'époque dévoila la triste vérité : les gens de ces temps-là se privaient terriblement pour avoir un accompagnement dans la mort digne de ce nom, et même les rois vivaient comme des clodos.


29.
Le théodolite sacré n'était pas un instrument de géomètre. Comme son nom l'indiquait, il servait à mesurer l'amplitude des manifestations divines. Bien réglé, il pouvait repérer des traces résiduelles de grâce des années après un miracle.
La commission de canonisation l'employa avant d'être retoquée par la Curie : l'appareil avait prouvé que l'intervention divine n'était impliquée que dans un miracle sur dix.


30.
Après la découverte d'une lame de silex à 5 mètres des ossements du cro-magnon, on ordonna une reconstitution.
On en conclut que le cro-magnon avait été tué par un individu de 1m65, sachant se servir d'un couteau, massif. Peut-être un néandertal.
On diffusa un signalement, mais une enquête de voisinage, 35000 ans après les faits...

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