J'ai enfin pris le temps de mettre le nez dans le nouveau Mignola, Le carnaval des cadavres, sorti à la rentrée chez Delcourt. Mignola, je suis fan depuis longtemps, depuis que j'avais pris ses Corum en VO (ils ont été traduits trente ans plus tard par ma pomme), le voyant évoluer sur Cosmic Odyssey, Le cycle des épées, son Alien qui était très bien et son Doc Strange que je vénère, puis ses Batman, avant d'arriver à Hellboy, l'univers qui l'a quand même pas mal occupé pendant les décennies suivantes.
Là, il se lance dans un nouvel univers, de fantasy, qui m'évoque très fort les contes de Dunsany (que Mignola doit probablement connaître) liés au cycle des Dieux de Pegàna (récemment réédité en intégrale chez Kalidor, je crois) qui reste un des fondements discrets de la fantasy d'avant Tolkien, ayant notamment influencé le Cycle du Rêve de Lovecraft. Chez Dunsany, les grandes épopées sont esquissées en quelques pages, ce qui compte vraiment ce sont les sensations, le presque trivial, l'ironie du destin, l'image curieuse. Autant dire qu'on est à mille lieues d'une fantasy à la Howard.
Alors, qu'en penser, de cet album ? Perso, j'ai beaucoup apprécié, même si c'est inégal par nature. En fait, la comparaison avec Dunsany s'impose, Mignola nous offre ici une succession de saynètes courtes et de contes reliés entre eux uniquement par une géographie à peine esquissée, avec les mêmes qualités et les mêmes défauts que son modèle (si c'est bien le cas, mais j'ignore s'il y a une volonté consciente de faire du Dunsany, je note juste que ça se croise).
On peut trouver que ça manque d'ambition, et c'est vrai. Mais à titre personnel, ça me convient assez : à mon sens, Mignola se plante quand il est trop ambitieux, toute la partie "grande saga" de Hellboy avec l'Appel des ténèbres et tout ça me tombe des mains (comme je dis, c'est personnel, je connais des gens très bien qui préfèrent ce volet là de Hellboy). Dans Hellboy, ce que j'aime le plus, ce sont justement les petits contes, les histoires pas longues explorant une légende, une situation, ces récits tous simples comme Le cadavre, avec ce pendu bavard et capricieux collé au basque du héros qui lui cherche une sépulture, ce genre de trucs. C'est exactement ce genre d'ambiance qu'on retrouve ici.
C'est dans ce style-là que je le trouve très bon, surtout qu'il poursuit dans son rendu graphique un peu lâché, plus libre, qui commence vraiment à mon sens dans Hellboy en enfer. Ça confère une forme de légèreté à des histoires qui pourraient être très noires, mais reste du domaine du conte, et c'est clairement l'intention ici. Il souhaite développer cette veine et un tome 2 est annoncé pour le printemps aux US. Je pense que je vais suivre.
Mais il faut le dire, Mignola qui dessine des villes médiévales décrépites et des tours tordues, je kiffe à la base, je suis donc de parti pris.
En bonus, un article sur une réédition de ses vieux boulots chez DC.




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