Un souvenir qui me revient, j'ignore absolument pourquoi il vient de poper comme ça dans ma tête, mais je viens de repenser à une session de travail sur Trois Coracles, qui avait ceci de particulier qu'elle n'avait pas eu lieu dans mon cadre habituel.
En règle générale, j'écris dans mon bureau ou dans les transports. Une bonne partie des Canaux du Mitan a été écrite dans le bus me menant à un boulot de remplacement que j'avais accepté, y a quelques années. Pas mal de chapitres d'Eschatôn ont été écrits dans des TGV. Mais, contrairement à d'autres collègues, j'écris rarement dans des bars. Il m'arrive de profiter des terrasses des quais, aux beaux jours, pour me poser avec un calepin, mais ça relève surtout de la prise de notes.
Et donc, par un soir d'hiver, j'avais accompagné une de mes mômes à un entretien de boulot à Paris, et je m'étais posé dans un rade vers Montparnasse pour l'attendre, sachant qu'il y en avait pour quelques heures. J'avais prévu le coup, j'avais amené un bouquin. Je m'étais plongé dans La légende de Saint Brendan, pour y chiper des idées et des ambiances dont je savais avoir besoin pour les Coracles (l'idée d'utiliser ce type de bateau précis venait d'ailleurs d'une précédente lecture, très lointaine, d'extraits de ce texte médiéval, et d'un papier lu y a des décennies sur une tentative de traversée de l'Atlantique par Tim Séverin à bord d'une de ces embarcations). J'avais déjà écrit plusieurs chapitres, mais je tenais à remettre le nez dans la scène de l'île de glace, que je me voyais bien utiliser dans mon propre bouquin. J'épluche la scène, je prends des notes, je poursuis ma lecture, je reviens en arrière...
Et puis paf, le chapitre est sorti quasi d'un coup, ou en tout cas la moitié de celui-ci, dans mon petit calepin, plusieurs pages de pattes de mouches (que j'ai passablement remaniées lorsque je les ai tapées trois jours plus tard, comme de juste), mais l'essentiel y était. Alors qu'il faisait nuit noire de l'autre côté de la vitrine, que je commandais à intervalles plus ou moins réguliers des verres de Côtes du Rhône, et du coup ces deux heures d'attente sont passées comme une lettre à la poste.
Pour info, quand j'écris des séquences dans mon calepin, je n'utilise que la page de droite. Celle de gauche est réservée pour d'éventuelles annotations ou renvois divers, références biblio, idées pour la suite, vérifications à faire quant à telle séquences précédentes, ou renvoi à des recherches à mener, genre distances entre deux lieux, dates, etc. Ça me permet, malgré mon écriture épouvantable, de m'y retrouver sans trop de soucis.
Deux autres séquences de Saint Brendan ont alimenté les Coracles, mais pour le coup, dans mon bureau pour la première (celle de l'île qui n'en était pas une), et dans une maison où j'étais en vacances (celle de la lumière divine), mais directement sur ordinateur dans les deux cas.
Pourquoi ça m'est revenu précisément aujourd'hui ? Grand mystère.
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