Accéder au contenu principal

Jailhouse rock around the clock

Peut-être à cause du confinement, peut-être à cause de recherches que j'ai eu à faire sur Blackgate, la prison de Gotham, j'ai été pris d'une envie subite de revoir The Rock, un peu comme on est pris d'une envie de pisser après trois bières de trop.
 
 N'y va pas, malheureux ! Tu sais que tu te fais du mal !


Ceux qui me connaissent savent que je ne goûte guère le cinéma de Michael Bay, ni l'ambiance Bruckheimer en général. J'aime bien les films d'action, hein, mais il y a chez Bay un je ne sais quoi (en fait, si, je sais très bien, ça va même être l'objet de cette notule) qui me fout de travers à chaque fois. Pourtant, je gardais un relativement bon souvenir de The Rock, vu à l'époque ou peu après (je crois me souvenir qu'un pote m'avait prêté la K7, c'est dire si ça ne nous rajeunit pas), que j'avais pris pour ce que c'était : un truc bas du front mais distrayant avec un chouette casting (oui, en vrai je l'aime bien, Nicolas Cage).

Après, y a Ed Harris, et lui je l'aime d'amour
Il pourrait jouer dans un Max Pécas
que j'irais voir de quoi il retourne

Bref, j'avais besoin de m'oxygéner la tête, et… Et bon. Dieu que c'est con, quand même, comme film. Si l'histoire en elle-même est d'un format somme toute assez courant (prise d'otage, gros danger, deux experts que tout sépare envoyés la régler), le traitement est… ben… du Michael Bay. Je n'aime pas son montage, et même si je reconnais qu'il sait filmer, je n'aime pas trop sa façon de le faire. C'est très efficace, mais ça a un côté… complaisant, je dirais.

Et puis y a ses dialogues. Alors, je sais que ça dépend de ses scénaristes, mais j'imagine que la direction d'acteur joue. Et comme dans les Bad Boys, j'ai l'impression d'un truc écrit par des élèves de quatrième qui découvrent les bouteilles de vodka orange du Lidl. Et assez souvent, dans ce film, les punchlines qui devraient claquer sont pas si bonnes que ça, voire tombent une seconde trop tôt ou trop tard pour être efficaces (le "Welcome to the Rock" lâché par Sean Connery est assez emblématique de ce problème).

Ça a changé, DragonBall Z


Et pourtant, Tarantino a fait un peu de script-doctoring là-dessus et ça se voit dans certaines scènes. Mais le fait demeure, on est dans une forme de stade terminal de l'actioneer bourrin de la décennie précédente, un truc qui a digéré Cameron, McTiernan, les films avec Schwarzie et Sly, et qui tente d'en livrer une version concentrée. Donc, pif paf, punchline, pif paf boum, punchline, développement de personnage vite fait mal fait (mais mieux dosé que dans Armageddon, du même, qui est chez moi le maître-en-talons de la foirade dans ce domaine), badaboum, référence culturelle saupoudrée pour montrer que le héros est un intellectuel, punchline, et on reprend du début ad-lib.

Ah oui, y a le Docteur Cox, aussi, et ça c'est cool

 Et donc, en revoyant The Rock, j'ai l'impression d'assister au stade terminal d'un certain cinéma, et de voir les germes de ce qui allait suivre. Comme si ce truc était un tournant, expliquant aussi bien les Fast en Furious que montrant un motif qui va devenir quasi ubiquitaire par la suite dans les films d'action : le méchant qui est un produit du système, soit qu'il soit le résultat de sa décrépitude, soit qu'il la dénonce pour de plus ou moins bonnes raisons. On le retrouve dans les derniers James Bond, dans les deux derniers Star Trek, dans Winter Soldier, dans les Bourne et les Mission Impossible, comme s'il devenait de plus en plus difficile de créer un adversaire extérieur (ils existent encore mais sont de plus en plus caricaturaux).

Les retournements à ce niveau sont complètement prévisibles, entre le général qu'on a bien pris soin de montrer comme honorable et certains de ses sbires qu'on a bien montré beaucoup plus troubles dès le départ, le mexican stand off de la fin n'est absolument pas surprenant.

Les facilités de scénar avec Nicolas Cage qui se prend une rouste, mais la boule en verre contenant le poison, dans sa poche, tient le choc jusqu'à ce qu'il en ait besoin, ou le tunnel de la fournaise sorti direct d'un jeu vidéo de l'époque, genre Prince of Persia…

Bref. J'ai pas passé un mauvais moment, mais je pense qu'il faudra à nouveau une vingtaine d'années avant que ne me reprenne l'envie de le revoir (ou de revoir un Michael Bay).

 
En fait, on se prend à rêver d'une version
Par Sam Raimi avec Bruce Campbell

Commentaires

artemus dada a dit…
Et encore, tu n'as pas dû voir "Six Underground" [-_ô]

Alex Nikolavitch a dit…
euh, non. le dernier que j'ai vu, c'était No Pain No Gain (que j'avais bien aimé, pour le coup, parce qu'il y a comme une espèce de recul sur ses persos de bourrins)
Tonton Rag a dit…
Je n'ai pas vu ce film depuis 20 ans, mais je me souviens que c'est un film raciste anti-serbe, qui laisse supposer, au début, qu'ils pourraient être des terroristes. Ce n'est pas le cœur du film, loin de là mais ce film de 1996 contribue à préparer l'opinion à l'agression de la Yougoslavie par l'OTAN en 1999.

Posts les plus consultés de ce blog

Back to back

 Et je sors d'une nouvelle panne de réseau, plus de 15 jours cette fois-ci. Il y a un moment où ça finit par torpiller le travail, l'écriture d'articles demandant à vérifier des référence, certaines traductions où il faut vérifier des citations, etc. Dans ce cas, plutôt que de glander, j'en profite pour avancer sur des projets moins dépendants de ma connexion, comme Mitan n°3, pour écrire une nouvelle à la volée, ou pour mettre de l'ordre dans de vieux trucs. Là, par exemple, j'ai ressorti tout plein de vieux scénarios de BD inédits. Certains demandaient à être complétés, c'est comme ça que j'ai fait un choix radical et terminé un script sur François Villon que je me traîne depuis des années parce que je ne parvenais pas à débusquer un élément précis dans la documentation, et du coup je l'ai bouclé en quelques jours. D'autres demandaient un coup de dépoussiérage, mais sont terminés depuis un bail et n'ont jamais trouvé de dessinateur ou d

Le Messie de Dune saga l'autre

Hop, suite de l'article de l'autre jour sur Dune. Là encore, j'ai un petit peu remanié l'article original publié il y a trois ans. Je ne sais pas si vous avez vu l'argumentaire des "interquelles" (oui, c'est le terme qu'ils emploient) de Kevin J. En Personne, l'Attila de la littérature science-fictive. Il y a un proverbe qui parle de nains juchés sur les épaules de géants, mais l'expression implique que les nains voient plus loin, du coup, que les géants sur lesquels ils se juchent. Alors que Kevin J., non. Il monte sur les épaules d'un géant, mais ce n'est pas pour regarder plus loin, c'est pour regarder par terre. C'est triste, je trouve. Donc, voyons l'argumentaire de Paul le Prophète, l'histoire secrète entre Dune et le Messie de Dune. Et l'argumentaire pose cette question taraudante : dans Dune, Paul est un jeune et gentil idéaliste qui combat des méchants affreux. Dans Le Messie de Dune, il est d

Le dessus des cartes

 Un exercice que je pratique à l'occasion, en cours de scénario, c'est la production aléatoire. Il s'agit d'un outil visant à développer l'imagination des élèves, à exorciser le spectre de la page blanche, en somme à leur montrer que pour trouver un sujet d'histoire, il faut faire feu de tout bois. Ceux qui me suivent depuis longtemps savent que Les canaux du Mitan est né d'un rêve, qu'il m'a fallu quelques années pour exploiter. Trois Coracles , c'est venu d'une lecture chaotique conduisant au télescopage de deux paragraphes sans lien. Tout peut servir à se lancer. Outre les Storycubes dont on a déjà causé dans le coin, il m'arrive d'employer un jeu de tarot de Marseille. Si les Storycubes sont parfaits pour trouver une amorce de récit, le tarot permet de produite quelque chose de plus ambitieux : toute l'architecture d'une histoire, du début à la fin. Le tirage que j'emploie est un système à sept cartes. On prend dans

Hail to the Tao Te King, baby !

Dernièrement, dans l'article sur les Super Saiyan Irlandais , j'avais évoqué au passage, parmi les sources mythiques de Dragon Ball , le Voyage en Occident (ou Pérégrination vers l'Ouest ) (ou Pèlerinage au Couchant ) (ou Légende du Roi des Singes ) (faudrait qu'ils se mettent d'accord sur la traduction du titre de ce truc. C'est comme si le même personnage, chez nous, s'appelait Glouton, Serval ou Wolverine suivant les tra…) (…) (…Wait…). Ce titre, énigmatique (sauf quand il est remplacé par le plus banal «  Légende du Roi des Singes  »), est peut-être une référence à Lao Tseu. (vous savez, celui de Tintin et le Lotus Bleu , « alors je vais vous couper la tête », tout ça).    C'est à perdre la tête, quand on y pense. Car Lao Tseu, après une vie de méditation face à la folie du monde et des hommes, enfourcha un jour un buffle qui ne lui avait rien demandé et s'en fut vers l'Ouest, et on ne l'a plus jamais revu. En chemin,

Nécrologie ou résurrection

 Hasard du calendrier, voici que ressurgit d'outre-tombe un personnage mort-vivant apparu dans un récit de Spawn, le "Necrocop", créations frankensteinienne de savants fous cherchant à créer un Spawn qu'ils pouvaient contrôler. Ce qui était sans doute illusoire, vu que les créateurs du vrai Spawn n'ont jamais pu contrôler leur propre mort-vivant. Back to the retour (Dans Scorched : L'Escouade Infernale tome 3) Bref. Pourquoi j'en parle ? Parce que derrière les savants-fous, il y avait des auteurs. Les vrais créateurs du personnage, ce sont Jeff Porcherot (alias Arthur Clare) et... moi-même. Et c'était y a pile vingt ans, ce qui ne nous rajeunit pas. Spawn Simonie , où était apparu le personnage, était un beau projet, une coédition entre Semic, l'éditeur de Spawn en France à l'époque, et Todd McFarlane, créateur et éditeur du personnage, qui nous a prêté son jouet. C'était exactement ça, quelque chose de beaucoup plus détendu que ce à quoi n

Vlad Tepes, dit Dracula

" Vous allez vous manger entre vous. Ou bien partir lutter contre les Turcs. " (Dracula, 1430 -1476) Dracula... Le surnom du prince des Valaques est devenu au fil du temps synonyme d'horreur et de canines pointues, principalement sous l'impulsion d'un écrivain irlandais, Bram Stoker, qui le dégrada d'ailleurs au point de le faire passer pour un comte, un bien triste destin pour un voïévode qui fit trembler l'empire qui faisait trembler l'Europe chrétienne. Tout se serait pourtant bien passé s'il n'avait pas été élevé à la cour du Sultan, comme cela se pratiquait à l'époque. En effet, il fut avec son demi-frère Radu otage des Turcs, afin de garantir la coopération de la famille, son père Vlad Dracul étant devenu par la force des choses le fantoche de l'envahisseur (le père se révolta pourtant et y laissa la vie. Mircea, le grand-frère, tenta le coup à son tour avec le même résultat. il est intéressant de noter que les otages

L'Empereur-Dieu de Dune saga l'autre

Hop, suite et fin des redifs à propos de Dune. Si jamais je me fends d'un "les hérétiques", ce sera de l'inédit. Le précédent épisode de notre grande série sur la série de Frank Herbert avait évoqué l'aspect manipulatoire de la narration dans  Dune , cette façon d'arriver à créer dans l'esprit du lecteur des motifs qui ne sont pas dans le texte initial. La manipulation est patente dans le domaine du mysticisme. Demandez à dix lecteurs de  Dune  si  Dune  est une série mystique, au moins neuf vous répondront "oui" sans ambage, considérant que ça va de soi. Il y a même des bonnes sœurs. C'est à s'y tromper, forcément. Et, un fois encore, le vieil Herbert (on oubliera charitablement le jeune Herbert et son sbire Kevin J. en personne) les aura roulés dans la farine. Dune  est une série dont l'aspect mystique est une illusion habile, un savant effet de manche. Certains personnages de la série sont mystiques. Certaines

Banzaï, comme disent les sioux dans les films de cape et d'épée

Hop, pour bien finir le mois, un petit coup de Crusades, tome 3 (non, on n'a pas encore déterminé le titre de l'épisode à ce stade). C'est toujours écrit par Nikolavitch (moi), Izu (lui) et dessiné par Zhang Xiaoyu (l'autre*). *je dis l'autre, parce qu'il existe aussi une Zhang Xiaoyu qui est un genre de star de l'internet en Chine pour des raisons de photos dévêtues, si j'ai bien tout compris)

Super-traumas de destruction massive

On le sait tous, pour peu qu'on ait un peu mis le nez dans les illustrés racontant les aventures de l'un ou l'autre super-slip combattant au nom de la vérité, de la justice ou de quoi que ce soit du même genre : leur origine est généralement lié à un traumatisme personnel plus qu'à l'obtention des pouvoirs. Pas de Spider-man s'interrogeant sur ses responsabilité sans la mort de l'Oncle Ben. Pas de Batman en croisade, sacrifiant sa vie dorée de milliardaire à une guerre sans fin sans l'agression subie par Thomas et Martha Wayne. Pas de Billy Butcher sans le viol de Rebecca et ses conséquences. (oui, bon, Butcher n'est pas exactement un super-héros, je sais). Pas de Docteur Strange sans la perte de sa dextérité de chirurgien qui l'a conduit à chercher des solutions drastiques et irrationnelles et à se remettre totalement en question sur le plan personnel. Pas de Wolverine en quête de lui-même sans les tripatouillages du projet

Fais-le, ou ne le fais pas, mais il n'y a pas d'essai

 Retravailler un essai vieux de dix ans, c'est un exercice pas simple. Ça m'était déjà arrivé pour la réédition de Mythe & super-héros , et là c'est reparti pour un tour, sur un autre bouquin. Alors, ça fait toujours plaisir d'être réédité, mais ça implique aussi d'éplucher sa propre prose et avec le recul, ben... Bon, c'est l'occasion de juger des progrès qu'on a fait dans certains domaines. Bref, j'ai fait une repasse de réécriture de pas mal de passages. Ça, c'est pas si compliqué, c'est grosso modo ce que je fais une fois que j'ai bouclé un premier jet. J'ai aussi viré des trucs qui ne me semblaient plus aussi pertinents qu'à l'époque. Après, le sujet a pas mal évolué en dix ans. Solution simple : rajouter un chapitre correspondant à la période. En plus, elle se prête à pas mal d'analyses nouvelles. C'est toujours intéressant. La moitié du chapitre a été simple à écrire, l'autre a pris plus de temps parce q