Accéder au contenu principal

Tentacules et épées magiques

L'article du jour commence par un petit erratum : dans mon album sur HP Lovecraft, page 70, HPL débarque chez une Madame Miniter, habitant à la campagne. Je savais qu'ils étaient correspondants, mais j'ai commis une erreur : au moment où à lieu cette scène, ils se sont déjà rencontrés au moins deux fois, alors que je l'écris comme s'ils ne s'étaient jamais vus en vrai.

(Je viens de m'apercevoir de ma bévue en lisant un chapitre de I am Providence, la biographie d'HPL par Joshi, à la traduction de laquelle je participe sous la direction de Christophe Thill pour le compte des éditions Actu SF) (j'ai bossé à partir de bouquins de Joshi, notamment son encyclopédie Lovecraft, mais pas de la bio elle-même)

Sinon, et je vous parlais de ce bouquin ici même, une de mes lectures de vacances, ça a été Uter Pandragon, de Thomas Spok, aux éditions Les Forces de Vulcain. Je vous en avais causé parce que mon prochain roman est justement sur le même sujet, et que du coup j'avais la trouille. Et en fait, les deux bouquins supporteront très bien une lecture croisée, je pense. En partant pour partie des mêmes sources (pour partie seulement, parce que le romancier a sur l'historien le privilège exorbitant de pouvoir sélectionner arbitrairement ses sources), et avec un même goût du mot ancien et oublié, on peut obtenir des résultats très différents. Son Uter est plus légendaire que mon Uther, son Pandragon n'est certainement pas mon Pendraig, son Vortigern est très différent de mon Gordiern (j'utilise une forme celtique de son nom, d'ailleurs, pour éviter la forme saxonne), je ne nomme pas Hengist (il est pourtant là) et je n'utilise pas Merlin : le personnage historique lui ayant servi de base étant postérieur à l'époque où est censé avoir vécu Uther.
Ce qui m'amène au cœur de nos différences de démarche : je tente de reconstituer historiquement la Bretagne du Ve siècle et d'inscrire mon Uther dans cette époque troublée, quitte à y injecter quand même de la magie. Spok est beaucoup plus dans la fable, dans une vision toute autre, et soyons clairs, tout aussi légitime dès qu'on parle d'épopée arthurienne.
Du coup, j'ai pu apprécier pleinement ce bouquin, sans que la comparaison au mien s'impose à moi pendant la lecture. Ce n'est pas le même propos, pas le même arc narratif du tout, et c'est une démonstration du fait que des icônes de ce genre supportent des lectures très différentes.
Et j'en profite pour le recommander au passage (ça vous dispensera pas de lire le mien quand il sortira, je vous vois venir, tas de galapiats !). Y a de superbes fulgurances, une scène d'ouverture très chouette, une relecture tout à fait étonnante du personnage (tout comme moi, Spok se refuse à réduire Uther Pendragon à la brute épaisse que nous présentent les légendes) et une écriture que j'aime beaucoup. Le rythme, par contre, pourra désarçonner un peu, ainsi que quelques twists manquant légèrement de clarté. Rien de grave (et c'est d'autant plus pardonnable que c'est un premier roman) ni de rédhibitoire. Franchement, allez y, ça dépoussière bien le mythe.

(Mon autre lecture de vacances, c'était le Berrouka, Celle qui n'a pas peur de Cthulhu, et c'est absolument super, ça aussi ça dépoussière bien le mythe, mais à la Berrouka, donc de façon bien plus trollesque)

Commentaires

Geoffrey a dit…
Tu nous apprends que Merlins serait basé sur un perso historique...et tu ne le nommes pas ! Si ça c'est pas du sadisme... ^^
Alex Nikolavitch a dit…
Alors, en fait, il semblerait que Myrdin ait été le surnom de Lailoken (ou l'inverse), un roi ou chef de guerre qui, après s'être pris un coup sur la tête à la bataille, s'est réfugié dans les bois et a commencé à raconter des trucs bizarres. les gens allaient le voir et décryptaient ses paroles comme si c'étaient des prophéties.
alors, il est possible que Myrdhin et Lailoken aient été deux personnages différents (selon les sources, l'un est donné comme Cambrien, l'autre comme Calédonien) mais les dates correspondent à peu près, le situant dans la deuxième moitié du sixième siècle (donc un siècle après Uther 70 à 80 ans après Arthur, pour autan qu'Arthur ait existé) et l'histoire aussi (bataille, forêt, prophéties).
Geoffrey a dit…
Merci pour ces précisions ;-)
Alex Nikolavitch a dit…
le gag, du coup, c'est qu'historiquement Merlin est nettement mieux attesté qu'Arthur

Posts les plus consultés de ce blog

Boy-scouts go home !

 Bon, je suis plus débordé que je ne l'aurais cru en cette période. Du coup, une autre rediff, un article datant d'il y a cinq ans. Au moment où Superman se retrouve à faire équipe avec Guy Gardner à l'écran, c'est peut-être le moment de ressorti celui-ci. Les super-héros sont des gentils propres sur eux affrontant des méchants ridicules, avec une dialectique générale qui est, selon le cas, celle du match de catch ou de la cour de récré. C’est en tout cas l’image qu’en a une large partie du grand public. Certains, notamment Superman, correspondent assez à ce cliché. D’autres héros s’avèrent moins lisses, et contre toute attente, ça ne date pas d’hier : aux origines des super-héros, dans les années 1930-40, on est même très loin de cette image de boy-scouts. Les héros de pulps, ancêtres directs des super-héros, boivent et courent la gueuse comme Conan, massacrent à tour de bras, comme le Shadow ou lavent le cerveau de leurs adversaires comme Doc Savage. Superman, tel que...

La pataphysique, science ultime

 Bon, c'est l'été. Un peu claqué pour trop mettre à jour ce blog, mais si j'en aurais un peu plus le temps que les mois précédents, mais là, justement, je souffle un peu (enfin presque, y a encore des petites urgences qui popent ici et là, mais j'y consacre pas plus de deux heures par jour, le reste c'est me remettre à écrire, bouger, faire mon ménage, etc.) Bref, je me suis dit que j'allais fouiller dans les étagères surchargées voir s'il y avait pas des trucs sympas que vous auriez peut-être loupés. Ici, un papier d'il y a déjà huit ans sur... la pataphysique.     Le geek, et plus encore son frère le nerd, a parfois une affinité avec la technologie, et assez souvent avec les sciences. Le personnage du nerd fort en science (alors que le « jock », son ennemi héréditaire, est fort en sport) est depuis longtemps un habitué de nos productions pop-culturelles préférées. Et, tout comme l’obsession du geek face à ses univers préféré, la démarche de la science ...

Dans la vallée, oho, de l'IA

 J'en avais déjà parlé ici , le contenu généré par IA (ou pour mieux dire, par LLM) envahit tout. Je bloque à vue des dizaines de chaînes par semaine pour ne pas polluer mes recommandations, mais il en pope tous les jours, avec du contenu de très basse qualité, fabriqué à la chaîne pour causer histoire ou science ou cinéma avec des textes assez nuls et des images collées au petit bonheur la chance, pour lequel je ne veux pas utiliser de bande passante ni perdre mon temps.   Ça me permet de faire un tri, d'avoir des vidéos d'assez bonne qualité. J'y tiens, depuis des années c'est ce qui remplace la télé pour moi. Le problème, c'est que tout le monde ne voit pas le problème. Plein de gens consomment ça parce que ça leur suffit, visiblement. Je suis lancé dans cette réflexion en prenant un train de banlieue ce matin. Un vieux regardait une vidéo de ce genre sans écouteurs (ça aussi, ça m'agace) et du coup, comme il était à deux places de moi, j'ai pu en ...

Fils de...

Une petite note sur une de ces questions de mythologie qui me travaillent parfois. Je ne sais pas si je vais éclairer le sujet ou encore plus l'embrouiller, vous me direz. Mon sujet du jour, c'est Loki.  Loki, c'est canoniquement (si l'on peut dire vu la complexité des sources) le fils de Laufey. Et, mine de rien, c'est un truc à creuser. Chez Marvel, Laufey est représenté comme un Jotun, un géant. Et, dans la mythologie nordique, le père de Loki est bien un géant. Sauf que... Sauf que le père de Loki, en vrai, c'est un certain Farbauti, en effet géant de son état. Un Jotun, un des terribles géants du gel. Et, dans la poésie scaldique la plus ancienne, le dieu de la malice est généralement appelé fils de Farbauti. Laufey, c'est sa mère. Et, dans des textes un peu plus tardifs comme les Eddas, il est plus souvent appelé fils de Laufey. Alors, pourquoi ? En vrai, je n'en sais rien. Cette notule n'est qu'un moyen de réfléchir à haute voix, ou plutôt...

Corps ben

 À intervalles réguliers, je me retrouve à bosser sur Corben. J'avais traduit les deux Monde mutant (avec un pincement au coeur : un endroit du même nom, mais au pluriel, était ma librairie de comics préférée, du temps de ma jeunesse folle), puis Murky World , un récit supplémentaire pour Esprit des morts , son recueil inspiré d'Edgar Poe (il avait raison d'aller piocher là-dedans, je l'ai toujours dit, c'est dans le vieux Poe qu'on fait la meilleure... mais je m'égare).   Beaucoup plus récemment, j'ai fait le tome 3 de Den, Les enfants du feu , dont l'édition collector vient de sortir de presses et l'édition courante sera en librairie à la rentrée. Un peu plus tard, il y aura Dimwood , son tout dernier récit, achevé peu de temps avant sa mort. Je recommande assez, c'est complètement chelou, Dimwood . Alors, Corben, vous allez me dire, c'est chelou. Et vous aurez raison. Il y a toujours chez lui un caractère grotesque, boursouflé, quand l...

Ressortie

 Les éditions Delcourt ressortent Torso , un des premiers gros projets de Brian M. Bendis, avant qu'il ne devienne une star suite à ses travaux chez Marvel, Daredevil et Alias en tête, puis ne se crame les ailes à devenir grand manitou des Avengers et des X-Men . Bendis est très bon dans un domaine, celui du polar à échelle humaine, et beaucoup moins dans les grandes conflagrations super-héroïques. Torso , ça relève de la première catégorie. Je pense que c'est justement le genre de bouquin qui a conduit Joe Quesada à lui confier Daredevil , d'ailleurs, c'est là que l'auteur s'impose aux yeux de tous. Le sujet est chouette, déjà : une des premières grosses affaires de tueurs en série en Amérique, le tueur aux Torses (ou Boucher de Cleveland , dans la version romancée par Max Allan Collins, auteur dont j'ai déjà parlé dans le coin). Particularité, au moment des sinistres exploits du tueur, la sécurité publique de la ville vient d'être confiée au célèbre...

En avant, marche !

Ça faisait longtemps, non, les homélies du dimanche ? Faut dire que j'ai enchaîné des gros trucs depuis septembre. Vous avez déjà vu un des résultats avec le bouquin sur Tolkien, mais d'autres choses vont arriver. Bref, je remettais le nez dans les vieux textes, parce que ça fait pas de mal, des fois, quand on est surmené et que j'écoute aussi les conférences du Collège de France sur l'exégèse biblique et tout ça. C'est le genre de trucs qui me requinquent quand je fais une pause. Et forcément, ça remet en route le ciboulot. Les rouages grincent au début, mais...  Vous vous rappelez peut-être de ma vieille réflexion sur  le Dieu qui "se promenait dans le jardin au souffle du jour" , il y a déjà... pfou, trop longtemps. un petit Edmund Dulac, parce que bon c'est toujours bien, Dulac   J'aime bien cette image de la Genèse, avec son petit côté presque bucolique et très incarné, les restes d'une vision moins abstraite et moins cosmique de Dieu, une...

Le nouveau Eastern

 Dans mon rêve de cette nuit, je suis invité dans une espèce de festival des arts à Split, en Croatie. Je retrouve des copains, des cousins, j'y suis avec certains de mes rejetons, l'ambiance est bonne. Le soir, banquets pantagruéliques dans un hôtel/palais labyrinthique aux magnifiques jardins. Des verres d'alcools locaux et approximatifs à la main, les gens déambulent sur les terrasses. Puis un pote me fait "mate, mec, c'est CLINT, va lui parler putain !"   Je vais me présenter, donc, au vieux Clint Eastwood, avec un entourage de proches à lui. Il se montre bienveillant, je lui cause vaguement de mon travail, puis je me lance : c'est ici, en Dalmatie, qu'il doit tourner son prochain western. Je lui vante les paysage désolés, les déserts laissés derrière eux par les Vénitiens en quête de bois d'ouvrage, les montagnes de caillasse et les buissons rabougris qui ont déjà servi à toutes sortes de productions de ce genre qui étaient tellement fauchées ...

Fais tourner le juin

Bon, il est temps que je sorte un peu de mon bunker. Ça tombe bien, je suis invité à deux événements que je connais. Le samedi 31 mai et le dimanche 1er juin, je serai au Geek Up Festival des Clayes sous Bois (78). C'est dans un part, y a des animations, d'autres auteurs, j'aurai un peu de stock de mes bouquins chez les Moutons électriques, et normalement y aura des exemplaires du Pop Icons Tolkien.  Le dimanche 15 juin après-midi, je serai au Salon des auteurs du coin, à la péniche Story Boat de Conflans Ste Honorine (78). Super cadre, c'est très cosy et ça vaut le coup de passer même en coup de vent parce qu'il y a de belles balades à faire aux alentours. Voilà, c'est tout pour l'instant, je sais pas encore trop comment ça va se passer pour la suite, mes prochaines dates sont en octobre, à Marmande et à Limoges. Je vous tiens au courant d'ici là.

L’image de Cthulhu

J'exhume à nouveau un vieil article, celui-ci était destiné au petit livret de bonus accompagnant le tirage de tête de Celui qui écrivait dans les ténèbres , mon album consacré à H.P. Lovecraft. Ça recoupe pas mal de trucs que j'ai pu dire dans d'autres articles, publiés dans des anthologies ou des revues, mais aussi lors de tables rondes en festival ou en colloque (encore cet hiver à Poitiers). J'ai pas l'impression que ce texte ait été retenu pour le livret et du coup je crois qu'il est resté inédit. Ou alors c'est que je l'avais prévu pour un autre support, mais dans ce cas, je ne me souviens plus duquel. Tant pis, ça date d'il y a sept ou huit ans...   L’œuvre d’H.P. Lovecraft a inspiré depuis longtemps des auteurs de bandes dessinées. D’ailleurs, l’existence de nombreuses passerelles entre l’univers des pulps (où a officié Lovecraft) et celui des comic books n’est plus à démontrer, ces derniers empruntant une large part de leurs thèmes aux revue...