Mon nouveau roman sort la semaine prochaine. Je vous rassure tout de suite, il n'a rien à voir avec du Nouveau Roman, par contre. C'est pas le genre de la maison. Donc, Trois Coracles Cinglaient vers le Couchant est en librairie jeudi prochain.
Plusieurs personnes m'ont déjà fait des remarques (souvent bienveillantes, mais souvent étonnées) sur son titre, dont je suis le premier à admettre qu'il est tout à fait alambiqué. Il y a là une forme de coquetterie de ma part, un jeu sur des formes anciennes : ce titre est, en fait, la première phrase du bouquin et c'était en des temps très anciens, quand les œuvres n'avaient pas encore de couverture ni de titre, la façon à laquelle on s'y référait. Ce que nous appelons "L'épopée de Gilgamesh" était pour les scribes ninivites "Exceptionnel monarque", et le récit de création babylonien "Lorsque les dieux". Un exemple connu : "Genèse" est le mot grec par lequel commence la traduction des Septante de la Bible. C'est resté. Vous allez dire que je fais mumuse avec des considérations érudites, et c'est vrai. Mais c'est un moyen comme un autre de trouver un titre pour un bouquin. Parce que parfois, c'est une atroce galère.
Parfois, le titre vient de lui-même. Pour des essais comme Cosmonautes ! c'est le sujet qui donne le titre. Tout au plus puis-je m'amuser un peu avec le sous-titre (c'est notamment le cas pour Apocalypses ! où j'ai fait le mariole, histoire de donner le ton). Pareil pour des biographies intégrées à des collections : Saint Louis, Burton, Lovecraft… Les titres s'imposent d'eux-mêmes.
C'est en fiction que ça se gâte. Parfois, le titre vient tout seul, POP : ça a été le cas pour L'île de Peter. Je l'ai trouvé très tôt lors du processus de création, il était à la fois assez vague et assez précis, il me semblait parfait (bien entendu, votre avis peut s'avérer différent, mais là, je parle de mon processus de décision). C'est Charlier, je crois, qui disait qu'un bon titre, c'est "un nom commun", "de", "un nom propre". Ou à la rigueur "nom", "au/à", "nom". Je ne sais pas s'il a raison, mais voilà, sur L'Île de Peter, on est pile là-dedans.
Parfois, le titre tombe tout seul, mais doit être changé en cours de route. J'ai eu très tôt en tête le titre d'Eschatôn, sauf que c'était "Eschatôn Diakonoï", au départ, et que dans sa grande sagesse l'éditeur m'a dit que deux mots grecs à la file, ça devenait compliqué. Et il avait probablement raison, je le dis sans ironie. On a donc raccourci. Mais j'aimais bien ma première version.
Problème un peu similaire avec un album qui aurait dû s'intituler "La Nuit sur le Mont Chauve". Quelques semaines avant l'envoi chez l'imprimeur, le diffuseur a fait remarquer qu'il y avait une confusion possible avec la série des "Nuits" que publiait Alex Baladi chez le même éditeur. Il a fallu trouver autre chose et vite. D'où brainstormings dont est sortie La Dernière Cigarette. Dont le titre a orienté très nettement la lecture des critiques. Il a l'air de tomber sous le sens, comme ça, mais ça a été le résultat d'intenses discussions. Il nous semblait trop cliché.
Dernier exemple, la série Crusades, aux Humanos. Crusades, c'était le titre de travail. Un gag partant de la volonté de mon co-scénariste de le "faire", ce Crusades imaginé par Paul Verhoeven, dans lequel Schwarzennator aurait dû tenir la vedette. Un truc ultra bad-ass avec le secret des Templiers. Et plus on avançait dedans, moins on trouvait de titre alternatif satisfaisant. Du coup c'est resté par défaut, sans qu'on sache quoi faire d'autre. Alors que ce n'est pas vraiment satisfaisant non plus. Notons que les titres d'épisode sont du pur Charlier dans le genre.
Voilà voilà, quelques considérations sur un problème que tous les auteurs se posent à un moment ou un autre.
(pro-tip : ne laissez jamais l'éditeur trouver le titre à votre place, sauf dans une logique de collection. ce sera naze dans 95% des cas, et même dans les 5% qui restent, vous êtes capables de trouver mieux, ou au pire d'assumer ce que vous trouverez).
Plusieurs personnes m'ont déjà fait des remarques (souvent bienveillantes, mais souvent étonnées) sur son titre, dont je suis le premier à admettre qu'il est tout à fait alambiqué. Il y a là une forme de coquetterie de ma part, un jeu sur des formes anciennes : ce titre est, en fait, la première phrase du bouquin et c'était en des temps très anciens, quand les œuvres n'avaient pas encore de couverture ni de titre, la façon à laquelle on s'y référait. Ce que nous appelons "L'épopée de Gilgamesh" était pour les scribes ninivites "Exceptionnel monarque", et le récit de création babylonien "Lorsque les dieux". Un exemple connu : "Genèse" est le mot grec par lequel commence la traduction des Septante de la Bible. C'est resté. Vous allez dire que je fais mumuse avec des considérations érudites, et c'est vrai. Mais c'est un moyen comme un autre de trouver un titre pour un bouquin. Parce que parfois, c'est une atroce galère.
Parfois, le titre vient de lui-même. Pour des essais comme Cosmonautes ! c'est le sujet qui donne le titre. Tout au plus puis-je m'amuser un peu avec le sous-titre (c'est notamment le cas pour Apocalypses ! où j'ai fait le mariole, histoire de donner le ton). Pareil pour des biographies intégrées à des collections : Saint Louis, Burton, Lovecraft… Les titres s'imposent d'eux-mêmes.
C'est en fiction que ça se gâte. Parfois, le titre vient tout seul, POP : ça a été le cas pour L'île de Peter. Je l'ai trouvé très tôt lors du processus de création, il était à la fois assez vague et assez précis, il me semblait parfait (bien entendu, votre avis peut s'avérer différent, mais là, je parle de mon processus de décision). C'est Charlier, je crois, qui disait qu'un bon titre, c'est "un nom commun", "de", "un nom propre". Ou à la rigueur "nom", "au/à", "nom". Je ne sais pas s'il a raison, mais voilà, sur L'Île de Peter, on est pile là-dedans.
Parfois, le titre tombe tout seul, mais doit être changé en cours de route. J'ai eu très tôt en tête le titre d'Eschatôn, sauf que c'était "Eschatôn Diakonoï", au départ, et que dans sa grande sagesse l'éditeur m'a dit que deux mots grecs à la file, ça devenait compliqué. Et il avait probablement raison, je le dis sans ironie. On a donc raccourci. Mais j'aimais bien ma première version.
Problème un peu similaire avec un album qui aurait dû s'intituler "La Nuit sur le Mont Chauve". Quelques semaines avant l'envoi chez l'imprimeur, le diffuseur a fait remarquer qu'il y avait une confusion possible avec la série des "Nuits" que publiait Alex Baladi chez le même éditeur. Il a fallu trouver autre chose et vite. D'où brainstormings dont est sortie La Dernière Cigarette. Dont le titre a orienté très nettement la lecture des critiques. Il a l'air de tomber sous le sens, comme ça, mais ça a été le résultat d'intenses discussions. Il nous semblait trop cliché.
Dernier exemple, la série Crusades, aux Humanos. Crusades, c'était le titre de travail. Un gag partant de la volonté de mon co-scénariste de le "faire", ce Crusades imaginé par Paul Verhoeven, dans lequel Schwarzennator aurait dû tenir la vedette. Un truc ultra bad-ass avec le secret des Templiers. Et plus on avançait dedans, moins on trouvait de titre alternatif satisfaisant. Du coup c'est resté par défaut, sans qu'on sache quoi faire d'autre. Alors que ce n'est pas vraiment satisfaisant non plus. Notons que les titres d'épisode sont du pur Charlier dans le genre.
Voilà voilà, quelques considérations sur un problème que tous les auteurs se posent à un moment ou un autre.
(pro-tip : ne laissez jamais l'éditeur trouver le titre à votre place, sauf dans une logique de collection. ce sera naze dans 95% des cas, et même dans les 5% qui restent, vous êtes capables de trouver mieux, ou au pire d'assumer ce que vous trouverez).
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