Accéder au contenu principal

On vaut mieux que deux tu l'auras

Le gros sujet politique de la semaine, ce n'est pas Donald Trump, qui reste le connard qu'il a toujours été (déjà sous Reagan quand il était l'idole des yuppies) ni le fait de savoir si Sarko pourra se maintenir ou pas dans une primaire où tous ses amis, même ceux qui tentent sincèrement de le défendre, ne font que lui savonner la planche.

Le truc qui ma semblé intéressant (dans les quelques moments où mon boulot m'a permis de souffler et de regarder un peu le monde qui m'entoure), c'est le phénomène #onvautmieuxqueça sur les réseaux sociaux, dont il est trop tôt pour savoir s'il va durer, mais qui vaut qu'on s'y arrête à plusieurs titres.

Primo, c'est un mouvement spontané complètement de l'ère numérique (je vais pas dire 2.0 parce que c'était un slogan publicitaire qui s'est bien ringardisé depuis) (et je ne vais pas dire 3.0 parce que je ne suis pas certain du truc). Des vedettes de Youtube, donc essentiellement des gens qui se sont formés seuls, de façon non institutionnelle, à la prise de parole publique, ont décidé de centraliser une partie de l'agacement rencontré par la nouvelle loi travail (qui montre au passage que le gouvernement n'est pas à une Khomri près) et par-delà cette loi, au management de droit divin qui est à mon sens le plus gros facteur de perte d'efficacité de l'entreprise française en tant qu'acteur économique (bien avant la bureaucratie, pourtant galopante, et surtout que la fiscalité, dont les entreprises bénéficient comme tout le monde via les infrastructures, subventions, etc.).

Parce qu'on l'a tous eu sur le dos un jour où l'autre, le manager sûr de lui qui vous prend pour des cons (et éventuellement finit par planter la boîte et est recasé dans le groupe, lui, contrairement à vous et vos collègues) ou qui refuse de répondre à vos questions sur la finalité de votre travail. (attention, j'ai eu aussi le cas inverse de chefs avec qui il était très agréable de bosser, avec qui on pouvait avancer de façon intelligente et tout. Mais bon, comme dirait l'autre "c'est comme les politiciens honnêtes. Ça existe, mais c'est pas la majorité du genre").

Donc, cette initiative née sur les réseaux sociaux et les plate-formes participatives visait à libérer la parole, à créer du lien et des solidarités, à casser l'isolement psychologique que le monde du travail en voie d'ubérisation rapide cultive à l'envi. Quelle sera la suite ? Difficile à dire, mais ce sont des choses qui vont dans le bon sens, et qui surtout remettent le doigt sur les vrais problèmes de notre société (et pas sur les trucs très spectaculaires, mais statistiquement peu significatifs dont les médias nous abreuvent).

L'autre truc qui m'a frappé, c'est cette notion que j'ai vu revenir à plusieurs reprises chez ceux des gens impliqués que j'ai pu entendre. "Ce n'est pas politique", "nous n'avons pas une approche politique". Je trouve ça très inquiétant, et même très grave.

Je m'explique.

Une telle initiative visant à recréer du collectif, à libérer une parole sociale, elle est politique par essence. Elle est même au cœur de ce que devrait être la politique si elle fonctionnait normalement et correctement. Cette insistance à se mettre en marge de la notion de politique est le symptôme de la dévalorisation profonde, de la démonétisation totale du fait politique dans notre société. La politique a tellement été confisquée par des partis qui dans les faits n'en font plus (ils ne débattent plus d'idées et de projets de société depuis longtemps, mais ne fonctionnent plus que part postures et personnalisation exacerbées) qu'un acte pourtant profondément politique, s'il veut être sûr de sa légitimité, doit occulter le terme, le rejeter. Ce que veulent dire ces jeunes gens, c'est que leur démarche n'est pas politicienne. Et ce n'est pas du tout la même chose. Toute discussion de nos modèles de société est forcément politique. Leur mouvement est donc politique. S'ils ne l'assument pas rapidement, il risque de retomber. Ce que je ne lui souhaite aucunement.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Au ban de la société

 Tiens, je sais pas pourquoi (peut-être un trop plein de lectures faites pour le boulot, sur des textes ardus, avec prise de note) j'ai remis le nez dans les Justice Society of America de Geoff Johns, période Black Reign . J'avais sans doute besoin d'un fix de super-héros classique, avec plein de persos et de pouvoirs dans tous les sens, de gros enjeux, etc. Et pour ça, y a pas à dire JSA ça fait très bien le job. La JSA, c'est un peu la grand-mère des groupes super-héroïques, fondée dans les années 40, puis réactivée dans les années 60 avec les histoires JLA/JSA su multivers. C'étaient les vieux héros patrimoniaux, une époque un peu plus simple et innocente. Dans les années 80, on leur avait donné une descendance avec la série Infinity Inc . et dans les années 90, on les avait réintégrés au prix de bricolages divers à la continuité principale de DC Comics, via la série The Golden Age , de James Robinson et Paul Smith, qui interprétait la fin de cette époque en la...

La fille-araignée

Tiens, ça fait une paye que j'avais pas balancé une nouvelle inédite... Voilà un truc que j'ai écrit y a 6 mois de ça, suite à une espèce de cauchemar fiévreux. J'en ai conservé certaines ambiances, j'en ai bouché les trous, j'ai lié la sauce. Et donc, la voilà... (et à ce propos, dites-moi si ça vous dirait que je fasse des mini-éditions de certains de ces textes, je me tâte là-dessus) Elle m’est tombée dessus dans un couloir sombre de la maison abandonnée. Il s’agissait d’une vieille villa de maître, au milieu d’un parc retourné à l’état sauvage, jouxtant le canal. Nul n’y avait plus vécu depuis des décennies et elle m’avait tapé dans l’œil un jour que je promenais après le travail, un chantier que j’avais accepté pour le vieil épicier du coin. J’en avais pour quelques semaines et j’en avais profité pour visiter les alentours. Après avoir regardé autour de moi si personne ne m'observait, je m’étais glissé dans une section effondrée du mur d’enceinte, j’...

La fin du moooonde après la fin de l'année

 Ah, tiens, voilà qu'on annonce pour l'année prochaine une autre réédition, après mon Cosmonautes : C'est une version un peu augmentée et au format poche de mon essai publié à l'occasion de la précédente fin du monde, pas celle de 2020 mais celle de 2012. Je vous tiens au courant dès que les choses se précisent. Et la couve est, comme de juste, de Melchior Ascaride.

Perte en ligne

 L'autre soir, je me suis revu Jurassic Park parce que le Club de l'Etoile organisait une projo avec des commentaires de Nicolas Allard qui sortait un chouette bouquin sur le sujet. Bon outil de promo, j'avais fait exactement la même avec mon L'ancelot y a quelques années. Jurassic Park , c'est un film que j'aime vraiment bien. Chouette casting, révolution dans les effets, les dinos sont cools, y a du fond derrière (voir la vidéo de Bolchegeek sur le sujet, c'est une masterclass), du coup je le revois de temps en temps, la dernière fois c'était avec ma petite dernière qui l'avait jamais vu, alors qu'on voulait se faire une soirée chouette. Elle avait aimé Indiana Jones , je lui ai vendu le truc comme ça : "c'est le mec qui a fait les Indiana Jones qui fait un nouveau film d'aventures, mais cette fois, en plus, y a des dinos. Comment peut-on faire plus cool que ça ?" Par contre, les suites, je les ai pas revues tant que ça. L...

Matin et brouillard

On sent qu'on s'enfonce dans l'automne. C'est la troisième matinée en quelques jours où le fleuve est couvert d'une brume épaisse qui rend invisible le rideau d'arbres de l'autre côté, et fantomatique tout ce qui est tapi sur les quais : voiture, bancs, panneaux. Tout a un contraste bizarre, même la surface de l'eau, entre gris foncé et blanc laiteux, alors qu'elle est marronnasse depuis les inondations en aval, le mois dernier. Une grosse barge vient de passer, j'entends encore vaguement dans le lointain son énorme moteur diesel. Son sillage est magnifique, dans cette lumière étrange, des lignes d'ondulations obliques venant s'écraser, puis rebondir sur le bord, les creux bien sombre, les crêtes presque lumineuses. Elles rebondissent, se croisent avec celles qui arrivent, et le jeu de l'interférence commence. Certaines disparaissent d'un coup, d'autres se démultiplient en vaguelettes plus petites, mais conservant leur orienta...

IA, IA, Fhtagn

 En ce moment, je bosse entre autres sur des traductions de vieux trucs pulps apparemment inédits sous nos latitudes. C'est un peu un bordel parce qu'on travaille à partir de PDFs montés à partir de scans, et que vu le papier sur lequel étaient imprimés ces machins, c'est parfois pas clean-clean. Les illustrateurs n'avaient  vraiment peur de rien Par chance, les sites d'archives où je vais récupérer ce matos (bonne nouvelle d'ailleurs archive.org qui est mon pourvoyeur habituel en vieilleries de ce genre, semble s'être remis de la récente attaque informatique qui avait failli m'en coller une. d'attaque, je veux dire) ont parfois une version texte faite à partir d'un OCR, d'une reconnaissance de caractère. Ça aide vachement. On s'use vachement moins les yeux. Sauf que... Ben comme c'est de l'OCR en batch non relu, que le document de base est mal contrasté et avec des typos bien empâtées et un papier qui a bien bu l'encre, le t...

Sorties

Hop, vite fait, mes prochaines sorties et dédicaces : Ce week-end, le 9 novembre, je suis comme tous les ans au Campus Miskatonic de Verdun, pour y signer toute mon imposante production lovecraftienne et sans doute d'autres bouquins en prime.   Dimanche 1er décembre, je serai au Salon des Ouvrages sur la BD à la Halle des blancs manteaux à Paris, avec mes vieux complices des éditions La Cafetière. Je participerai également à un Congrès sur Lovecraft et les sciences, 5 et 6 décembre à Poitiers.

Au nom du père

 Tout dernièrement, j'ai eu des conversations sur la manière de créer des personnages. Quand on écrit, il n'y a dans ce domaine comme dans d'autre aucune règle absolue. Certains personnages naissent des nécessité structurelle du récit, et il faut alors travailler à leur faire dépasser leur fonction, d'autres naissent naturellement d'une logique de genre ou de contexte, certains sont créés patiemment et se développent de façon organique et d'autres naissent d'un coup dans la tête de leur auteur telle Athéna sortant armée de celle de Zeus. Le Père Guichardin, dans les Exilés de la plaine , est un autre genre d'animal. Lui, c'est un exilé à plus d'un titre. Il existe depuis un sacré bail, depuis bien avant le début de ma carrière d'auteur professionnel. Il est né dans une nouvelle (inédite, mais je la retravaillerai à l'occasion) écrite il y a plus d'un quart de siècle, à un moment où je tentais des expériences d'écriture. En ce temp...

Et merde...

J'avais une idée d'illus sympa, un petit détournement pour mettre ici et illustrer une vacherie sur notre Leader Minimo, histoire de tromper l'ennui que distille cette situation pré insurrectionnelle pataude et molle du chibre dans laquelle tente péniblement de se vautrer l'actualité. Et donc, comme de juste en pareil cas, je m'en étais remis à gougueule pour trouver la base de mon détournement. Le truc fastoche, un peu potache, vite fait en prenant mon café. Sauf que gougueule est impitoyable et m'a mis sous le nez les oeuvres d'au moins deux type qui avaient exactement eu la même idée que moi. Les salauds. Notez que ça valide mon idée, d'une certaine façon. Mais quand même. C'est désobligeant. Ils auraient pu m'attendre. C'est un de ces cas que mon estimable et estimé collègue, le mystérieux J.W., appelle "plagiat par anticipation". Bon, c'est plutôt pas mal fait, hein. Mais ça m'agace.

Deux-ception

 C'est complètement bizarre. Je rêve de façon récurrente d'un festival de BD qui a lieu dans une ville qui n'existe pas. L'endroit où je signe est dans un chapiteau, sur les hauteurs de la ville (un peu comme la Bulle New York à Angoulème) mais entre cet endroit et la gare routière en contrebas par laquelle j'arrive, il y a un éperon rocheux avec des restes de forteresse médiévale, ça redescend ensuite en pente assez raide, pas toujours construite, jusqu'à une cuvette où il y a les restaus, bars et hôtels où j'ai mes habitudes. L'hôtel de luxe est vraiment foutu comme ça sauf que la rue sur la droite est en très forte pente Hormis l'avenue sur laquelle donne l'hôtel de luxe (où je vais boire des coups dans jamais y loger, même en rêve je suis un loser), tout le reste du quartier c'est de la ruelle. La géographie des lieues est persistante d'un rêve à l'autre, je sais naviguer dans ce quartier. Là, cette nuit, la particularité c'ét...