Régulièrement, on voit des responsables s'en prendre à des instituts de sondages accusés de manipuler l'opinion, mais aussi d'être incapables de prévoir l'avenir. La bonne foi de ces responsables est souvent à prendre avec des pincettes tant elle est avariée. Parce que le problème, avec les instituts de sondages, il n'est pas forcément là : le fait de reprocher à des instituts de sondages de ne pas voir l'avenir correctement, c'est déjà un aveu clair d'incompréhension de ce qu'est censé être un institut de sondages. C'est prendre BVA, Ipsos ou Sofres pour des succursales de Madame Irma les mains planant au-dessus de sa boule de cristal et la tête nantie d'un turban que même Alice Sapritch n'en a jamais eu un d'aussi funky au faite de sa gloire.
Le vrai problème, il est dans les sondages absurdes et faux-culs.
Tenez, dernièrement, j'ai vu passer un sondage sur le "film le plus surestimé de l'année 2012". Et là, le concept me heurte un peu. Un sondage, c'est une sorte d'instantané d'une opinion. Un sondage sur "un film surestimé", c'est l'instantané d'une opinion à propos d'une opinion. Le sujet du sondage n'est donc pas le film en lui-même, mais la hype et la promotion qui l'ont entouré. En soi, s'interroger sur la perception qu'on a de la promo est intéressant, mais l'intitulé du sondage brouille les cartes : tous les commentaires et les analyses du sondage en question se rapportaient aux films eux-mêmes, à leurs qualités et défauts, mais pas à la promotion.
Le sondage n'était pas "quel est le film le plus pourri de 2012", ou "le film le plus prétentieux", non, c'est "le plus surestimé". Ce qui veut dire précisément qu'on interroge les sondés sur la perception qu'ils ont de la perception d'autrui. C'est casse gueule. Mais l'avantage, c'est que ça évite de se fâcher. Ça évite de poser la question du film le plus pourri ou le plus boursouflé de prétention. Ce qui pourrait fâcher les maisons de production, qui elles aussi commandent des sondages tout en faisant semblant d'avoir un regard critique.
C'est comme si dans un sondage politique, on vous demandait "François Hollande est-il trop critiqué (ou trop encensé) ?" au lieu de demander "avez-vous confiance en François Hollande ?" Ça induit toutes sortes de biais qui rendent une lecture efficace et pertinente du sondage impossible.
Pour la petite histoire, les sondés ont trouvé à une écrasante majorité que Avengers était plus surestimé que Prometheus. Je trouve ça intéressant. Il semblerait que les deux films soient rangés dans la même catégorie. Les critiques sous-tendues par le sondage sont du même ordre : trop de spectacle au service d'un scénario assez bébête. Sauf si quantitativement, la bêtise des deux films est peut-être du même ordre de grandeur, qualitativement, elle n'est pas du tout de même nature.
L'auteur d'Avengers a avant tout cherché à faire un spectacle rigolo mêlant dramatisation, effets spéciaux qui claquent et passages obligés d'un genre. Il livre un produit assez formaté, mais cohérent, qui tire habilement parti de son formatage. Le film a été vendu comme tel et il n'y a pas eu tromperie sur la marchandise.
L'auteur de Prometheus, lui, n'a tellement pas su se dépatouiller de sa note d'intention de départ qu'il a fini par en changer en cours de route, mais que les coutures se voient encore. Il tente de se draper dans les oripeaux de la grande philosophie, feignant de s'interroger sur la nature humaine, d'où venons-nous et où allons-nous, mais ses réponses et ses pistes sont tellement absurdes qu'il donne à côté de la plaque. à plusieurs dizaines d'année lumière à côté, même. En ce qui concerne la nature humaine, quand on l'étudie par le biais du fonctionnement des personnages humains présents dans le film plutôt que par les intentions affichées, le constat est accablant : l'humain est confondant de stupidité et mérite probablement d'être exterminé (alors que la note d'intention semble être "l'homme peut surmonter ses limitations et se hisser au rand de ses créateurs"). Prometheus se voulait un film de grande SF intelligente, et il n'échoue même pas sur la ligne d'arrivée : il se prend les pieds dans ses lacets après avoir fait deux pas sur la piste.
Que les sondés mettent les deux films sur un pied d'égalité en dit plus long sur la façon dont ils consomment les films que sur quoi que ce soit d'autre : ils jugent du spectacle, de la bêtise réelle ou perçue du scénario, mais pas de ce que le film est en lui-même, et surtout pas de ce qu'ils tente d'être. Ils jugent plus sévèrement un film pas très fin, mais qui n'a jamais tenté de l'être et un pensum affligeant qui se croit intelligent, et arrive à leur faire croire qu'il l'est un peu plus. Alors que le plus intelligent des deux, justement, me semble être celui qui ne cherchait pas à être assis plus haut que son propre cul...
Le vrai problème, il est dans les sondages absurdes et faux-culs.
Tenez, dernièrement, j'ai vu passer un sondage sur le "film le plus surestimé de l'année 2012". Et là, le concept me heurte un peu. Un sondage, c'est une sorte d'instantané d'une opinion. Un sondage sur "un film surestimé", c'est l'instantané d'une opinion à propos d'une opinion. Le sujet du sondage n'est donc pas le film en lui-même, mais la hype et la promotion qui l'ont entouré. En soi, s'interroger sur la perception qu'on a de la promo est intéressant, mais l'intitulé du sondage brouille les cartes : tous les commentaires et les analyses du sondage en question se rapportaient aux films eux-mêmes, à leurs qualités et défauts, mais pas à la promotion.
Le sondage n'était pas "quel est le film le plus pourri de 2012", ou "le film le plus prétentieux", non, c'est "le plus surestimé". Ce qui veut dire précisément qu'on interroge les sondés sur la perception qu'ils ont de la perception d'autrui. C'est casse gueule. Mais l'avantage, c'est que ça évite de se fâcher. Ça évite de poser la question du film le plus pourri ou le plus boursouflé de prétention. Ce qui pourrait fâcher les maisons de production, qui elles aussi commandent des sondages tout en faisant semblant d'avoir un regard critique.
C'est comme si dans un sondage politique, on vous demandait "François Hollande est-il trop critiqué (ou trop encensé) ?" au lieu de demander "avez-vous confiance en François Hollande ?" Ça induit toutes sortes de biais qui rendent une lecture efficace et pertinente du sondage impossible.
François Hollande et Jean-Marc Ayrault dans
"Qui a tué la croissance ?"
un thriller palpitant sur France 3
L'auteur d'Avengers a avant tout cherché à faire un spectacle rigolo mêlant dramatisation, effets spéciaux qui claquent et passages obligés d'un genre. Il livre un produit assez formaté, mais cohérent, qui tire habilement parti de son formatage. Le film a été vendu comme tel et il n'y a pas eu tromperie sur la marchandise.
L'auteur de Prometheus, lui, n'a tellement pas su se dépatouiller de sa note d'intention de départ qu'il a fini par en changer en cours de route, mais que les coutures se voient encore. Il tente de se draper dans les oripeaux de la grande philosophie, feignant de s'interroger sur la nature humaine, d'où venons-nous et où allons-nous, mais ses réponses et ses pistes sont tellement absurdes qu'il donne à côté de la plaque. à plusieurs dizaines d'année lumière à côté, même. En ce qui concerne la nature humaine, quand on l'étudie par le biais du fonctionnement des personnages humains présents dans le film plutôt que par les intentions affichées, le constat est accablant : l'humain est confondant de stupidité et mérite probablement d'être exterminé (alors que la note d'intention semble être "l'homme peut surmonter ses limitations et se hisser au rand de ses créateurs"). Prometheus se voulait un film de grande SF intelligente, et il n'échoue même pas sur la ligne d'arrivée : il se prend les pieds dans ses lacets après avoir fait deux pas sur la piste.
Que les sondés mettent les deux films sur un pied d'égalité en dit plus long sur la façon dont ils consomment les films que sur quoi que ce soit d'autre : ils jugent du spectacle, de la bêtise réelle ou perçue du scénario, mais pas de ce que le film est en lui-même, et surtout pas de ce qu'ils tente d'être. Ils jugent plus sévèrement un film pas très fin, mais qui n'a jamais tenté de l'être et un pensum affligeant qui se croit intelligent, et arrive à leur faire croire qu'il l'est un peu plus. Alors que le plus intelligent des deux, justement, me semble être celui qui ne cherchait pas à être assis plus haut que son propre cul...
Commentaires
* C'est de la merde.