Francis Ford Coppola + Mario Puzo = trilogie cinématographique mythique.
L'équation est connue.
Mais dans un autre univers, elle aurait pu donner tout à faut autre chose.
Imaginons que ce soit au début, et non pas dans la seconde moitié des années 70 que DC Comics ait décidé de développer Superman au cinéma, dans la foulée de son rapprochement avec Warner.
Puzo est mis sur le coup, et il ramène Francis Ford Coppola, à moins que ce ne soit l'inverse. Un bouillonnement créatif se met en place. Superman est un personnage trop grand pour tenir dans un seul film. Ce sera un diptyque, qui deviendra par la suite trilogie, mais un peu plus tard.
Des noms sont évoqués, hallucinants : Marlon Brando, Jacqueline Bisset... C'est un ancien marine découvert par Scorcese, Harvey Keitel, qui décroche le rôle titre. Mais il se fâche rapidement avec Coppola, qui finit par le débarquer sans cérémonie. Finalement, la Warner casse la tirelire et ce sera Burt Lancaster.
Le premier film raconte la fin de carrière de Lex Luthor (Marlon Brando) dont l'empire est mis à mal par l'arrivée d'un être venu d'ailleurs : Superman. Superbe film sur la solitude du pouvoir auquel s'accroche un Luthor qui a fait le vide autour de lui, opposé à Superman qui, quoi qu'étranger, a fini par se bâtir une famille. La performance de Brando, crâne rasé, ayant pris 70 kilos pour le rôle, est unanimement saluée. Le public accroche directement à cet univers pourtant connu, mais dont la réinterprétation est étonnante.
C'est un triomphe colossal qui génère forcément une foule d'imitations, dont un curieux et anémique Spider-Man, avec Nicholas Hammond, et un Power Man avec Richard Roundtree, sauvé par la bande son magistrale d'Isaac Hayes.
Mais c'est le deuxième Superman, sorti deux ans plus tard, qui fait entrer le personnage dans la légende du cinéma. L'intrigue principale montre Superman tentant de ramasser les débris de l'empire de Luthor pour en faire une force au service du bien, alors qu'un méchant originaire de sa planète, le général Zod (Terrance Stamp) débarque sur Terre pour poursuivre une vendetta familiale commencée une génération plus tôt. Mais un récit parallèle raconte l'ascension de Jor El (rien moins que Robert DeNiro) sur la planète Krypton et ses premières passes d'armes contre Zod.
Le film fait un malheur et récolte plusieurs oscars. DeNiro ne s'en remettra d'ailleurs jamais, la moitié de sa carrière, par la suite, sera occupée à des rôles de scientifiques extraterrestres. Coppola tente de s'éloigner du genre super-héros avec un film de guerre situé au Vietnam, dont il doit néanmoins laisser la direction, finalement, à son ami George Lucas (qui fait carton plein aussi avec cette adaptation très libre, et curieusement assez légère, de Joseph Conrad, avec le jeune Mark Hammill dans le rôle du commandant Willard remontant le fleuve avec Harrison Ford et Alec Guinness pour aller libérer Carrie Fischer prisonnière de David Prowse qui interprète le maléfique colonel Kurtz).
Car la Warner ne veut pas lâcher son prodige qui transforme les super-slips de papier en mythe de la pellicule. Mais ni Martian Manhunter (avec Peter Boyle) ni Justice Club (une adaptation de la Justice League décalée de Giffen et DeMatteis, avec Richard Gere en Maxwell Lord, Greg Hines en Blue Beetle et Nicolas Cage en Booster Gold, à ne pas confondre avec le film du même titre sorti deux ans auparavant par John Hugues, dans lequel des version parodiques, mais reconnaissables de Robin, Kid Flash, Aqualad et Wonder Girl sont enfermées dans la Tour des Titans un samedi après-midi par Alfred Pennyworth) ne réussissent à convaincre le public.
Coppola réussit alors à obtenir en 1990 de tourner le crépusculaire Superman Part III, dans lequel le héros vieillissant est confronté au culte que lui vouent les masses, et qui l'a peu à peu corrompu. Sa tentative de rédemption tourne mal, faisant de lui un personnage totalement messianique.
Prenant le public au dépourvu, ce film reste comme le mal aimé de la trilogie, le remplacement de Jacqueline Bisset par Diane Keaton pour le rôle de Lois Lane est vécu comme une trahison par les fans, et celui de Lancaster (effectivement trop vieux et se remettant de toute façon difficilement d'une mauvaise chute de cheval) par Alex Balwin suscite l'incompréhension totale de tout le monde. Pourtant, c'est à une belle relecture du personnage que se livrent Puzo et Coppola réunis, livrant un film à la fois plus noir que le Batman sorti l'année précédente et plus sobre dans la forme.
Après ce chant du cygne, le film de super-héros connait une longue éclipse, et il faut en 2004 l'épique New Gods de Wolfgang Petersen (avec Brad Pitt dans le rôle d'Orion et Brian Cox dans celui de Darkseid) pour relancer l'intérêt du public.
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Alec Nikolavitch est l'auteur de Mafia & Super-Héros, un essai se fondant sur l'œuvre de Mario Puzo pour rapprocher les thématiques et structures narratives des récits d'affranchis et de ceux des rebelles costumés vivant dans une société parallèle.
L'équation est connue.
Mais dans un autre univers, elle aurait pu donner tout à faut autre chose.
Imaginons que ce soit au début, et non pas dans la seconde moitié des années 70 que DC Comics ait décidé de développer Superman au cinéma, dans la foulée de son rapprochement avec Warner.
Puzo est mis sur le coup, et il ramène Francis Ford Coppola, à moins que ce ne soit l'inverse. Un bouillonnement créatif se met en place. Superman est un personnage trop grand pour tenir dans un seul film. Ce sera un diptyque, qui deviendra par la suite trilogie, mais un peu plus tard.
Des noms sont évoqués, hallucinants : Marlon Brando, Jacqueline Bisset... C'est un ancien marine découvert par Scorcese, Harvey Keitel, qui décroche le rôle titre. Mais il se fâche rapidement avec Coppola, qui finit par le débarquer sans cérémonie. Finalement, la Warner casse la tirelire et ce sera Burt Lancaster.
Le premier film raconte la fin de carrière de Lex Luthor (Marlon Brando) dont l'empire est mis à mal par l'arrivée d'un être venu d'ailleurs : Superman. Superbe film sur la solitude du pouvoir auquel s'accroche un Luthor qui a fait le vide autour de lui, opposé à Superman qui, quoi qu'étranger, a fini par se bâtir une famille. La performance de Brando, crâne rasé, ayant pris 70 kilos pour le rôle, est unanimement saluée. Le public accroche directement à cet univers pourtant connu, mais dont la réinterprétation est étonnante.
C'est un triomphe colossal qui génère forcément une foule d'imitations, dont un curieux et anémique Spider-Man, avec Nicholas Hammond, et un Power Man avec Richard Roundtree, sauvé par la bande son magistrale d'Isaac Hayes.
Mais c'est le deuxième Superman, sorti deux ans plus tard, qui fait entrer le personnage dans la légende du cinéma. L'intrigue principale montre Superman tentant de ramasser les débris de l'empire de Luthor pour en faire une force au service du bien, alors qu'un méchant originaire de sa planète, le général Zod (Terrance Stamp) débarque sur Terre pour poursuivre une vendetta familiale commencée une génération plus tôt. Mais un récit parallèle raconte l'ascension de Jor El (rien moins que Robert DeNiro) sur la planète Krypton et ses premières passes d'armes contre Zod.
Le film fait un malheur et récolte plusieurs oscars. DeNiro ne s'en remettra d'ailleurs jamais, la moitié de sa carrière, par la suite, sera occupée à des rôles de scientifiques extraterrestres. Coppola tente de s'éloigner du genre super-héros avec un film de guerre situé au Vietnam, dont il doit néanmoins laisser la direction, finalement, à son ami George Lucas (qui fait carton plein aussi avec cette adaptation très libre, et curieusement assez légère, de Joseph Conrad, avec le jeune Mark Hammill dans le rôle du commandant Willard remontant le fleuve avec Harrison Ford et Alec Guinness pour aller libérer Carrie Fischer prisonnière de David Prowse qui interprète le maléfique colonel Kurtz).
Car la Warner ne veut pas lâcher son prodige qui transforme les super-slips de papier en mythe de la pellicule. Mais ni Martian Manhunter (avec Peter Boyle) ni Justice Club (une adaptation de la Justice League décalée de Giffen et DeMatteis, avec Richard Gere en Maxwell Lord, Greg Hines en Blue Beetle et Nicolas Cage en Booster Gold, à ne pas confondre avec le film du même titre sorti deux ans auparavant par John Hugues, dans lequel des version parodiques, mais reconnaissables de Robin, Kid Flash, Aqualad et Wonder Girl sont enfermées dans la Tour des Titans un samedi après-midi par Alfred Pennyworth) ne réussissent à convaincre le public.
Coppola réussit alors à obtenir en 1990 de tourner le crépusculaire Superman Part III, dans lequel le héros vieillissant est confronté au culte que lui vouent les masses, et qui l'a peu à peu corrompu. Sa tentative de rédemption tourne mal, faisant de lui un personnage totalement messianique.
Prenant le public au dépourvu, ce film reste comme le mal aimé de la trilogie, le remplacement de Jacqueline Bisset par Diane Keaton pour le rôle de Lois Lane est vécu comme une trahison par les fans, et celui de Lancaster (effectivement trop vieux et se remettant de toute façon difficilement d'une mauvaise chute de cheval) par Alex Balwin suscite l'incompréhension totale de tout le monde. Pourtant, c'est à une belle relecture du personnage que se livrent Puzo et Coppola réunis, livrant un film à la fois plus noir que le Batman sorti l'année précédente et plus sobre dans la forme.
Après ce chant du cygne, le film de super-héros connait une longue éclipse, et il faut en 2004 l'épique New Gods de Wolfgang Petersen (avec Brad Pitt dans le rôle d'Orion et Brian Cox dans celui de Darkseid) pour relancer l'intérêt du public.
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Alec Nikolavitch est l'auteur de Mafia & Super-Héros, un essai se fondant sur l'œuvre de Mario Puzo pour rapprocher les thématiques et structures narratives des récits d'affranchis et de ceux des rebelles costumés vivant dans une société parallèle.
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