Accéder au contenu principal

La courte vue n'est pas le monopole des courts sur pattes

Oui, parce que pour une fois, notre Petit Mamamouchi national n'est pas seul responsable des problèmes du pays. Là, c'est plutôt une forme de myopie collective des décideurs qui me conduit à me caresser la barbe d'un air pensif.

Deux affaires ont coup sur coup posé la question du contrôle des substances chimiques et pharmaceutiques, celle du Mediator et celle des tapis-puzzle. Comme, sur le Mediator, certaines alertes semblent avoir été données il y a longtemps, ça permet aux décideurs actuels de se défausser avec élégance sur leurs prédécesseurs. Mais l'affaire des tapis-puzzle montre que les mêmes processus sont encore à l'œuvre.

L'affaire des tapis-puzzle, c'est la découverte que des agents ajoutés aux plastique pour l'assouplir peuvent avoir des effets délétères sur la santé, surtout quand l'usager numéro un est un nourrisson. Les produits concernés sont donc retirés de la vente pour enquête complémentaire. C'est louable. Frédéric Lefebvre est même monté au créneau sur les sujet, ce qui démontre contre toute attente qu'il peut servir à quelque chose d'intelligent, des fois, ne serait-ce que par inadvertance. Oui, mais...

Mais l'année dernière, ce sont sur des biberons et autres bouteilles de ketchup qu'on avait posé exactement le même problème. Un agent de texture des plastiques qui était peut-être délétère, et qu'on a retiré par précaution. Qu'est-ce qu'on parie que l'année prochaine, ce sera l'agent de texture du lino, des bottes en caoutchouc ou des cirés bretons qui sera mis en cause ? L'affaire des biberons aurait pu être l'occasion de lancer une évaluation de TOUS ces agents de texture. Mais non, on agit au coup par coup, dans la précipitation, en espérant que la prochaine fois, ça tombe sur le successeur, parce que c'est pas tout ça, mais les industriels gueulent quand on leur demande de retirer des produits.

Mediator, c'est un produit qui, depuis longtemps, n'est plus prescrit pour son indication première. C'était un produit contre le diabète, mais on l'utilise depuis des années en complément de régimes amincissants. Or, ça fait vingt ans que le législateur resserre les vis sur les médicaments amaigrissants, les coupes faim, les extraits thyroïdiens, diurétiques et autres saloperies qui finissent par sérieusement esquinter. Sauf que là encore, c'est du coup par coup.

Quand Isomeride a été retiré de la vente, on a fait semblant de ne pas voir que Mediator posait le même problème : facile de se défausser, ce n'était pas un amaigrissant, c'était un produit pour le diabète. Pas d'évaluation globale de tous les produits prescrits hors de leur champ normal d'indication et détournés de leur usage pour que madame entre dans son maillot de bain. Il faut dire que la pression est terrible. Madame réclame à son médecin, et change de médecin si elle n'obtient pas satisfaction. à tel point que même les nutritionnistes, pourtant censés savoir que certains mélanges sont dangereux, prescrivent à tour de bras et sans contrôle. Pourtant, avec la Carte Vitale et son traitement automatisé des données, rien ne serait plus simple pour la Sécu que d'épingler en masse les médecins qui prescrivent hors AMM. Sauf que la clientèle de ces médecins, ce sont aussi les femmes de députés ou de ministres...

Alors il faut des morts pour qu'on ouvre le dossier. Et qu'on le referme vite fait, pour éviter les éclaboussures. En attendant le suivant. Et des médicaments sortent encore avec des dossiers bidonnés, des études bâclées, des pattes graissées.

Et on continue à gérer au coup par coup, quand il est sans doute trop tard, en essayant de refiler le bébé au voisin, au prédécesseur ou à tout bouc émissaire commode, sans prendre de recul. En attendant le suivant. Et celui d'après. Et ainsi de suite.

Commentaires

Po(p)litiques a dit…
Et tout cela n'a rien à voir avec la présence des industriels dans les commissions d'évaluation des médicaments ou celle des politiques dans les comités exécutifs ou directoire des entreprises concernées. Rien à voir du tout.
Alex Nikolavitch a dit…
oui, mais pas que, justement. Il y a d'autres facteurs qui s'y additionnent.
Zaïtchick a dit…
N'empêche que nos "chers" (c'est le cas de le dire) parlementaires les accumulent en matière de démago, favoritisme, lobbying et langue de bois : rien que ce matin, on a eu droit à l'amendement de "tolérance" pour les députés qui trichent en déclarant leur patrimoine et on apprend incidemment que J.-F. Coppé est en vacances à Cuba ! Cuba ! Une des dernières dicature communiste sur Terre où monsieur le libéral va passer ses vacances ! (Pas à Guantanamo, hein, à Cuba.) Pendant ce temps-là, l'éducation nationale est au régime sec mais les sénateurs votent une rallonge pour l'enseignement privé. Et un petit passage sur la façon dont le GVT Berlusconi massacre le patrimoine de Pompéi, y a pas que chez nous qu'ils se la donnent comme dirait Soldat Louis... "On" nous a promis la rupture, en ce qui me concerne, elle est consommée. Avec la politique.
Po(p)litiques a dit…
Disons qu'au lieu de payer des anciens ministres X milliers d'euros pour des rapports foireux, on ferait effectivement mieux de mettre cet argent dans des analyses poussées de l'ensemble des agents suspects dans notre environnement.
Problème : ils doivent se dire que l'économie va suffisamment mal sans interdire des produits, certes dangereux, mais qui se vendent tellement bien...

Posts les plus consultés de ce blog

Au ban de la société

 Tiens, je sais pas pourquoi (peut-être un trop plein de lectures faites pour le boulot, sur des textes ardus, avec prise de note) j'ai remis le nez dans les Justice Society of America de Geoff Johns, période Black Reign . J'avais sans doute besoin d'un fix de super-héros classique, avec plein de persos et de pouvoirs dans tous les sens, de gros enjeux, etc. Et pour ça, y a pas à dire JSA ça fait très bien le job. La JSA, c'est un peu la grand-mère des groupes super-héroïques, fondée dans les années 40, puis réactivée dans les années 60 avec les histoires JLA/JSA su multivers. C'étaient les vieux héros patrimoniaux, une époque un peu plus simple et innocente. Dans les années 80, on leur avait donné une descendance avec la série Infinity Inc . et dans les années 90, on les avait réintégrés au prix de bricolages divers à la continuité principale de DC Comics, via la série The Golden Age , de James Robinson et Paul Smith, qui interprétait la fin de cette époque en la...

La fille-araignée

Tiens, ça fait une paye que j'avais pas balancé une nouvelle inédite... Voilà un truc que j'ai écrit y a 6 mois de ça, suite à une espèce de cauchemar fiévreux. J'en ai conservé certaines ambiances, j'en ai bouché les trous, j'ai lié la sauce. Et donc, la voilà... (et à ce propos, dites-moi si ça vous dirait que je fasse des mini-éditions de certains de ces textes, je me tâte là-dessus) Elle m’est tombée dessus dans un couloir sombre de la maison abandonnée. Il s’agissait d’une vieille villa de maître, au milieu d’un parc retourné à l’état sauvage, jouxtant le canal. Nul n’y avait plus vécu depuis des décennies et elle m’avait tapé dans l’œil un jour que je promenais après le travail, un chantier que j’avais accepté pour le vieil épicier du coin. J’en avais pour quelques semaines et j’en avais profité pour visiter les alentours. Après avoir regardé autour de moi si personne ne m'observait, je m’étais glissé dans une section effondrée du mur d’enceinte, j’...

La fin du moooonde après la fin de l'année

 Ah, tiens, voilà qu'on annonce pour l'année prochaine une autre réédition, après mon Cosmonautes : C'est une version un peu augmentée et au format poche de mon essai publié à l'occasion de la précédente fin du monde, pas celle de 2020 mais celle de 2012. Je vous tiens au courant dès que les choses se précisent. Et la couve est, comme de juste, de Melchior Ascaride.

Perte en ligne

 L'autre soir, je me suis revu Jurassic Park parce que le Club de l'Etoile organisait une projo avec des commentaires de Nicolas Allard qui sortait un chouette bouquin sur le sujet. Bon outil de promo, j'avais fait exactement la même avec mon L'ancelot y a quelques années. Jurassic Park , c'est un film que j'aime vraiment bien. Chouette casting, révolution dans les effets, les dinos sont cools, y a du fond derrière (voir la vidéo de Bolchegeek sur le sujet, c'est une masterclass), du coup je le revois de temps en temps, la dernière fois c'était avec ma petite dernière qui l'avait jamais vu, alors qu'on voulait se faire une soirée chouette. Elle avait aimé Indiana Jones , je lui ai vendu le truc comme ça : "c'est le mec qui a fait les Indiana Jones qui fait un nouveau film d'aventures, mais cette fois, en plus, y a des dinos. Comment peut-on faire plus cool que ça ?" Par contre, les suites, je les ai pas revues tant que ça. L...

Matin et brouillard

On sent qu'on s'enfonce dans l'automne. C'est la troisième matinée en quelques jours où le fleuve est couvert d'une brume épaisse qui rend invisible le rideau d'arbres de l'autre côté, et fantomatique tout ce qui est tapi sur les quais : voiture, bancs, panneaux. Tout a un contraste bizarre, même la surface de l'eau, entre gris foncé et blanc laiteux, alors qu'elle est marronnasse depuis les inondations en aval, le mois dernier. Une grosse barge vient de passer, j'entends encore vaguement dans le lointain son énorme moteur diesel. Son sillage est magnifique, dans cette lumière étrange, des lignes d'ondulations obliques venant s'écraser, puis rebondir sur le bord, les creux bien sombre, les crêtes presque lumineuses. Elles rebondissent, se croisent avec celles qui arrivent, et le jeu de l'interférence commence. Certaines disparaissent d'un coup, d'autres se démultiplient en vaguelettes plus petites, mais conservant leur orienta...

IA, IA, Fhtagn

 En ce moment, je bosse entre autres sur des traductions de vieux trucs pulps apparemment inédits sous nos latitudes. C'est un peu un bordel parce qu'on travaille à partir de PDFs montés à partir de scans, et que vu le papier sur lequel étaient imprimés ces machins, c'est parfois pas clean-clean. Les illustrateurs n'avaient  vraiment peur de rien Par chance, les sites d'archives où je vais récupérer ce matos (bonne nouvelle d'ailleurs archive.org qui est mon pourvoyeur habituel en vieilleries de ce genre, semble s'être remis de la récente attaque informatique qui avait failli m'en coller une. d'attaque, je veux dire) ont parfois une version texte faite à partir d'un OCR, d'une reconnaissance de caractère. Ça aide vachement. On s'use vachement moins les yeux. Sauf que... Ben comme c'est de l'OCR en batch non relu, que le document de base est mal contrasté et avec des typos bien empâtées et un papier qui a bien bu l'encre, le t...

Sorties

Hop, vite fait, mes prochaines sorties et dédicaces : Ce week-end, le 9 novembre, je suis comme tous les ans au Campus Miskatonic de Verdun, pour y signer toute mon imposante production lovecraftienne et sans doute d'autres bouquins en prime.   Dimanche 1er décembre, je serai au Salon des Ouvrages sur la BD à la Halle des blancs manteaux à Paris, avec mes vieux complices des éditions La Cafetière. Je participerai également à un Congrès sur Lovecraft et les sciences, 5 et 6 décembre à Poitiers.

Au nom du père

 Tout dernièrement, j'ai eu des conversations sur la manière de créer des personnages. Quand on écrit, il n'y a dans ce domaine comme dans d'autre aucune règle absolue. Certains personnages naissent des nécessité structurelle du récit, et il faut alors travailler à leur faire dépasser leur fonction, d'autres naissent naturellement d'une logique de genre ou de contexte, certains sont créés patiemment et se développent de façon organique et d'autres naissent d'un coup dans la tête de leur auteur telle Athéna sortant armée de celle de Zeus. Le Père Guichardin, dans les Exilés de la plaine , est un autre genre d'animal. Lui, c'est un exilé à plus d'un titre. Il existe depuis un sacré bail, depuis bien avant le début de ma carrière d'auteur professionnel. Il est né dans une nouvelle (inédite, mais je la retravaillerai à l'occasion) écrite il y a plus d'un quart de siècle, à un moment où je tentais des expériences d'écriture. En ce temp...

Et merde...

J'avais une idée d'illus sympa, un petit détournement pour mettre ici et illustrer une vacherie sur notre Leader Minimo, histoire de tromper l'ennui que distille cette situation pré insurrectionnelle pataude et molle du chibre dans laquelle tente péniblement de se vautrer l'actualité. Et donc, comme de juste en pareil cas, je m'en étais remis à gougueule pour trouver la base de mon détournement. Le truc fastoche, un peu potache, vite fait en prenant mon café. Sauf que gougueule est impitoyable et m'a mis sous le nez les oeuvres d'au moins deux type qui avaient exactement eu la même idée que moi. Les salauds. Notez que ça valide mon idée, d'une certaine façon. Mais quand même. C'est désobligeant. Ils auraient pu m'attendre. C'est un de ces cas que mon estimable et estimé collègue, le mystérieux J.W., appelle "plagiat par anticipation". Bon, c'est plutôt pas mal fait, hein. Mais ça m'agace.

Deux-ception

 C'est complètement bizarre. Je rêve de façon récurrente d'un festival de BD qui a lieu dans une ville qui n'existe pas. L'endroit où je signe est dans un chapiteau, sur les hauteurs de la ville (un peu comme la Bulle New York à Angoulème) mais entre cet endroit et la gare routière en contrebas par laquelle j'arrive, il y a un éperon rocheux avec des restes de forteresse médiévale, ça redescend ensuite en pente assez raide, pas toujours construite, jusqu'à une cuvette où il y a les restaus, bars et hôtels où j'ai mes habitudes. L'hôtel de luxe est vraiment foutu comme ça sauf que la rue sur la droite est en très forte pente Hormis l'avenue sur laquelle donne l'hôtel de luxe (où je vais boire des coups dans jamais y loger, même en rêve je suis un loser), tout le reste du quartier c'est de la ruelle. La géographie des lieues est persistante d'un rêve à l'autre, je sais naviguer dans ce quartier. Là, cette nuit, la particularité c'ét...