Accéder au contenu principal

Dernière minute

On vient de m'annoncer la mort de Jean Rollin.

Je viens vous en parler ici parce que, dans les morts cinématographiques, elle va immanquablement être éclipsée par celle de Blake Edwards.

Jean Rollin, pour ceux qui ne le connaissent pas, c'est -c'était- une sorte de phénomène innexpliqué du cinéma français, un homme qui a patiemment labouré le même sillon narratif des années durant. Rollin, c'est Bunuel qui se serait pris pour le fils de Jesus Franco et d'Eric Rohmer, ou l'inverse, ce sont d'improbables films de vampires à l'érotisme étrange et à la narration complètement éthérée, ces longs plans séquence, ces mêmes brise-lames battus par les flots sur une morne plage qu'on retrouve d'un film à l'autre… C'est bizarrement fascinant et hypnotique, c'est un plaisir diffus qui se mérite.

Si vous n'avez jamais scotché devant un film de Jean Rollin, fin bourré à deux heures du matin, vous ne pouvez pas comprendre ce que je ressens ce soir.

Voilà voilà...

Commentaires

Zaïtchick a dit…
'tain.
Jipé va faire la gueule.
Uriel a dit…
Ce sont aussi quelques pornos pas désagréables, je le salue au moins pour ça.
Anonyme a dit…
Tu pleures la disparition de Jean Rollin, je me lamente de celle de Blake Edwards.

Toi, le surfeur anonyme qui passera par ce blog, choisis ton camp! ^________^
El a dit…
Alors bon, voilà, je vais être un peu méchant et complètement en désaccord. Avec tous le respect que je dois à l'auteur de ce blog... S'il ne veut pas que ça paraisse (ce que je comprendrais), qu'il modère le commentaire, je ne lui en voudrais pas... Mais pourquoi me taire ?
Ahem, bref...
"Narration ethérée" ? Je ne sais pas ce que ça veut dire, même après avoir relu la phrase plusieurs fois, si ce n'est que je la retrouve dans wikipedia, à peu près... Mais je ne te jette pas la pierre, c'est une expression qui colle sans doute au sujet et ce n'est pas pomper que de reprendre un seul mot qu'on aime bien...
Si ça se trouve, c'est une coïncidence, ou c'est toi qui a fait l'article sur Wiki.
N'empêche, je ne sais toujours pas ce que ça veut dire, "narration éthérée". Une narration, déjà, c'est pas physique... Est-ce que ça veut dire qu'on peut l'attaquer seulement avec des armes magiques +1 au moins ?
Parce que moi, la narration de Jean Rollin, j'eusse aimé l'attaquer à coup de pelle.
Mon avis (et je le partage) est qu'il faut vraiment être fin bourré, effectivement, et n'avoir rien d'autre à faire à 2h du matin, pour apprécier un film de Jean Rollin... Autrement, pas possible.
Pornos softs (parfois pas si softs que ça d'ailleurs) vaguement expérimentaux d'une époque antique, qui s'éternisent en monologues où l'acteur (minable) sent qu'il n'a rien à dire, et tente vainement de donner du relief à un texte pourrissime. Il ne se passe rien, ce n'est même pas du nanar d'action distrayant.
Après avoir subi "La morte vivante" et des extraits des "deux orphelines vampires" dans le cadre d'une soirée chez un ami (qui n'est plus mon ami, mais pas à cause de ça) il y a bien longtemps (je n'avais pas choisi le film... j'ai été faire autre chose pendant le deuxième et la fin du premier, n'en pouvant plus...), j'ai décidé que moi et Jean Rollin, nous ne nous entendrions pas.
Que sa mort soit éclipsée par celle de Blake Edwards ? Mais voyons, ce n'est que justice ! Un réalisateur de faux boulards façon artiste qui se paluche, je pense que les varices de ma concierge pourrait éclipser sa mort.
Edmond TOURRIOL a dit…
Sinon, tiens, quand j'ai lu que Blake Edwards était mort, mon cerveau n'a fait qu'un tour dans le mauvais sens et a cru que c'était Andrew Blake qui venait de casser sa pipe. Lui, il serait mort au noir et blanc, au ralenti. Avec la gaule.
Alex Nikolavitch a dit…
El, tu fais partie des gens qui n'ont pas scotché par hasard devant le Viol du Vampire à une heure indue et avec un taux d'alcoolémie à mettre dans le coma un gainsbourg de calibre réglementaire. Tu es dans le cas dont je parlais en fin de texte : tu ne peux juste pas comprendre.

C'est presque shamanique, comme expérience.
Alex Nikolavitch a dit…
après, je suis d'accord. ton pote (ex pote) qui a imposé deux Jean Rollin à la suite est probablement une crapule (mais bon, la Morte Vivante, je l'avais trouvé assez distrayant, pour ma part).
Anonyme a dit…
Ce que j'ai vu des films de Rollin me conduisait immanquablement, au bout de deux, trois minutes de vision, à supputer quel pouvait avoir été le budget de l'entreprise. J'aboutissais généralement à un chiffre de deux ou trois milliers de francs, en comptant la location de la caméra et les casse-croûtes au saucisson sur les lieux du tournage.

Le budget est pas un critère de qualité, mais cghez Rollin, ça virait au substitut de scénario... ^__________^
Alex Nikolavitch a dit…
N'empêche, il a un nom à avoir une place au Panthéon.

"Entre ici, Jean Rollin"
soyouz a dit…
C'est bizarre, "narration éthérée" pour définir le style de Jean Rollin, ça me parle !
Pourtant, je n'ai pas souvenir que j'étais bourré. "Shamanique", ouais, ça colle bien aussi !
Uriel a dit…
Alors si par "narration" tu veux dire "tenues féminines", okay, mais sinon ? J'étais même pas au courant qu'il y avait une tentative de narration...
Zaïtchick a dit…
C'est un metteur en scène audacieux par ses choix thématiques et de mise en scène... N'empêche que l'alcool doit aider beaucoup à adhérer au truc... Bon, Jean Rollin est (enfin, était) le Dieu vivant (heu, mort) du ciné-club d'Aurillac, sachez-le.
(D'ailleurs, saviez-vous qu'il y avait un ciné-club à Aurillac, hein ? Et en aviez-vous quelque chose à faire, hein ? Non... Bien sûr... Bonne nuit.)
Marianne Ciaudo a dit…
Merde alors... faut que je passe ici pour apprendre la nouvelle.
T_T p'tain, t'as le chic pour me coller le bourdon avec tes analyses sur notre super société. Bon, j'vais allumer ma console moi et rouler le roi du cosmos...

Posts les plus consultés de ce blog

Et ça va causer dans le poste encore

 Bon, ça faisait plusieurs fois qu'on me conseillait de me rapprocher de Radionorine, la petite web-radio associative dont les locaux sont à quelque chose comme **vérifie sur gogolemap** 500 mètres de la Casa Niko. Je connaissais de vue une partie de l'équipe, un pote à moi faisait une émission chez eux en son temps, un autre vient d'en lancer une, et voilà que j'ai un atelier d'écriture qui se déroule... un étage en-dessous. Bref, l'autre jour, ils m'ont invité pour que je cause de mon travail et de cet atelier. Et en préparant l'interview, on a causé hors antenne, forcément. Et donc, je peux annoncer ici qu'il y aura désormais une émission mensuelle, le Legendarium ,  où je causerai d'imaginaire littéraire (et sans doute pas que). La première sera consacrée à Robert E. Howard et Conan, le jeudi 27 novembre à 19h, la deuxième peut-être à Beowulf le jeudi 11 décembre (on essaiera de se coller le deuxième jeudi du mois autant que possible). C...

Brumes du passé

Pour diverses raisons, notamment des textes sur lesquels je travaille et qui sont très différents les uns des autres, je remets le nez dans les ancienne mythologies slaves. J'en ai déjà parlé à propos de Tchernobog , c'est un abominable foutoir, une source infinie de frustration, plus encore que l'étude des mythes celtes ou germains. En Scandinavie, Islande, Irlande et ailleurs, on a su préserver des récits, des textes, parfois des fragments énigmatiques, qui nous éclairent un tout petit peu. Pour les Slaves, on est face à un champ de ruines (je ne vais pas dire que c'est traditionnel dans ces pays-là, mais bon, un peu quand même). Même les comparatistes s'y cassent les dents. Comment interpréter Perun ? De prime abord, c'est le cousin très proche de Thor/Donar et de Taranis. Est-il en fait le descendant d'une divinité primordiale vénérée à l'âge du bronze ? Possible. Mais les mondes slaves, germains et celtes n'ont jamais été des boîtes étanches. Le...

Sonja la rousse, Sonja belle et farouche, ta vie a le goût d'aventure

 Je m'avise que ça fait bien des lunes que je ne m'étais pas penché sur une adaptation de Robert E. Howard au cinoche. Peut-être est-ce à cause du décès de Frank Thorne, que j'évoquais dernièrement chez Jonah J. Monsieur Bruce , ou parce que j'ai lu ou relu pas mal d'histoires de Sonja, j'en causais par exemple en juillet dernier , ou bien parce que quelqu'un a évoqué la bande-son d'Ennio Morricone, mais j'ai enfin vu Red Sonja , le film, sorti sous nos latitudes sous le titre Kalidor, la légende du talisman .   On va parler de ça, aujourd'hui Sortant d'une période de rush en termes de boulot, réfléchissant depuis la sortie de ma vidéo sur le slip en fourrure de Conan à comment lui donner une suite consacrée au bikini en fer de Sonja, j'ai fini par redescendre dans les enfers cinématographiques des adaptations howardiennes. Celle-ci a un statut tout particulier, puisque Red Sonja n'est pas à proprement parler une création de Robert H...

Noir c'est noir. Ou pas.

 Je causais ailleurs de l'acteur Peter Stormare, qui jouait Czernobog (ou Tchernobog, ou Crnobog, prononcer "Tsr'nobog" dans ce dernier cas) dans la série American Gods , mais qui était aussi Lucifer dans le film Constantine et le nihiliste qui veut couper le zizi du Dude.   de nos jours, il lui latterait plutôt les roubignoles au Dude Tchernobog (ou Czernobog, ou Crnobog) c'est un dieu classique des mythologies slaves, sur lequel il a été beaucoup écrit, un dieu noir et hivernal opposé à la lumière, enfermé dans un cycle de mort et de résurrection, avec donc un rôle dans la fertilité. C'est sur ce mythe-là que Gaiman base son personnage dans American Gods , justement. Les chrétiens l'ont immédiatement assimilé à un diable, et c'est la lecture qu'en fait Disney dans le segment "La nuit sur le Mont Chauve" dans Fantasia .   J'entends cette image   Faut dire que le gars est pas aidé : son nom signifie précisément "dieu noir"...

Le slip en peau de bête

On sait bien qu’en vrai, le barbare de bande dessinées n’a jamais existé, que ceux qui sont entrés dans l’histoire à la fin de l’Antiquité Tardive étaient romanisés jusqu’aux oreilles, et que la notion de barbare, quoiqu’il en soit, n’a rien à voir avec la brutalité ou les fourrures, mais avec le fait de parler une langue étrangère. Pour les grecs, le barbare, c’est celui qui s’exprime par borborygmes.  Et chez eux, d’ailleurs, le barbare d’anthologie, c’est le Perse. Et n’en déplaise à Frank Miller et Zack Snyder, ce qui les choque le plus, c’est le port du pantalon pour aller combattre, comme nous le rappelle Hérodote : « Ils furent, à notre connaissance, les premiers des Grecs à charger l'ennemi à la course, les premiers aussi à ne pas trembler d’effroi à la vue du costume mède ». Et quand on fait le tour des autres peuplades antiques, dès qu’on s’éloigne de la Méditerranée, les barbares se baladent souvent en falzar. Gaulois, germains, huns, tous portent des braies. Ou alo...

Coup double

 Ainsi donc, je reviens dans les librairies le mois prochain avec deux textes.   Le premier est "Vortace", dans le cadre de l'anthologie Les Demeures terribles , chez Askabak, nouvel éditeur monté par mes vieux camarades Melchior Ascaride (dont vous reconnaissez dans doute la patte sur la couverture) et Meredith Debaque. L'idée est ici de renouveler le trope de la maison hantée. Mon pitch :   "Les fans d'urbex ne sont jamais ressortis de cette maison abandonnée. Elle n'est pourtant pas si grande. Mais pourrait-elle être hantée par... un simple trou dans le mur ?" Le deuxième, j'en ai déjà parlé, c'est "Doom Niggurath", qui sortira dans l'anthologie Pixels Hallucinés, première collaboration entre L'Association Miskatonic et les éditions Actu-SF (nouvelles).  Le pitch :  "Lorsque Pea-B tente un speed-run en live d'un "mod" qui circule sur internet, il ignore encore qu'il va déchainer les passions, un ef...

De géants guerriers celtes

Avec la fin des Moutons, je m'aperçois que certains textes publiés en anthologies deviennent indisponibles. J'aimais bien celui-ci, que j'ai sérieusement galéré à écrire à l'époque. Le sujet, c'est notre vision de l'héroïsme à l'aune de l'histoire de Cúchulainn, le "chien du forgeron". J'avais par ailleurs parlé du personnage ici, à l'occasion du roman que Camille Leboulanger avait consacré au personnage . C'est une lecture hautement recommandable.     Cúchulainn, modèle de héros ? Guerrier mythique ayant vécu, selon la légende, aux premiers temps de l’Empire Romain et du Christianisme, mais aux franges du monde connu de l’époque, Cúchulainn a, à nos yeux, quelque chose de profondément exotique. En effet, le « Chien du forgeron » ne semble ni lancé dans une quête initiatique, ni porteur des valeurs que nous associons désormais à l’héroïsme. Et pourtant, sa nature de grand héros épique demeure indiscutable, ou en tout cas...

En repassant loin du Mitan

 Bilan de la semaine : outre un peu de traduction, j'ai écrit  - 20000 signes d'un prochain roman - 20000 signes de bonus sur le prochain Chimères de Vénus (d'Alain Ayrolles et Etienne Jung - 30000 signes d'articles pour Geek Magazine    Du coup je vous mets ci-dessous un bout de ce que j'ai fait sur ce roman (dans l'univers du Mitan, même si je n'ai plus d'éditeur pour ça à ce stade, mais je suis buté). Pour la petite histoire, la première scène du bouquin sera tirée, poursuivant la tradition instaurée avec Les canaux du Mitan, d'un rêve que je j'ai fait. Le voici (même si dans la version du roman, il n'y aura pas de biplans) . On n'est pas autour de la plaine, cette fois-ci, je commence à explorer le vieux continent :   Courbé, il s’approcha du fond. À hauteur de sa poitrine, une niche était obstruée par une grosse pierre oblongue qu’il dégagea du bout des doigts, puis fit pivoter sur elle-même, dévoilant des visages entremêlés. Une fo...

Ça va s'arranger, Monsieur Milan !

Hop, encore un petit article sauvé du naufrage de superpouvoir. J'ai hésité à le poster sur la nouvelle version du site, et puis finalement je le rapatrie ici, comme ça ne parle pas vraiment de comics. Petit tour de table pour débuter la négo La provocation a toujours été consubstantielle de l'activité artistique. à quoi ça tient, mystère. Peut-être au fait que l'artiste, par nature, est un peu en marge du corps social et a donc la distance nécessaire pour l'interroger. Mais "provocation", le mot semble faible pour qualifier les outrances de Laibach. travailleurs de tous les pays... Pour ceux qui ne connaissent pas, Laibach, c'est un peu l'ancêtre sous amphètes de Rammstein. D'ailleurs, un des membres de Laibach le disait : "ouais, c'est bien, ce qu'ils font, Rammstein. Ils rendent notre style de musique accessible aux kids, c'est important." Je paraphrase. Mais donc, provocation. C'est un mot qu...

Aïe glandeur

Ça faisait bien longtemps que je ne m'étais pas fendu d'un bon décorticage en règle d'une bonne bousasse filmique bien foireuse. Il faut dire que, parfois, pour protéger ce qu'il peut me rester de santé mentale, et pour le repos de mon âme flétrie, je m'abstiens pendant de longues périodes de me vautrer dans cette fange nanardesque que le cinéma de genre sait nous livrer par pleins tombereaux. Et puis parfois, je replonge. Je repique au truc. De malencontreux enchaînements de circonstances conspirent à me mettre le nez dedans. Là, cette fois-ci, c'est la faute à un copain que je ne nommerai pas parce que c'est un traducteur "just wow", comme on dit, qui m'avait mis sur la piste d'une édition plus complète de la musique du film Highlander . Et qu'en effet, la galette était bien, avec de chouettes morceaux qui fatalement mettent en route la machine à nostalgie. "Fais pas le con, Niko ! Tu sais que tu te fais du mal !" ...