Accéder au contenu principal

Parodie et parano à moins que ce ne soit l'inverse

De temps en temps, je regarde les stats du blog, pour voir quels mots clés amènent les gens ici. Il y a parfois des trucs assez grotesques, j'en avais déjà parlé, et aussi des trucs qui semblent délibérés, tapés par de facétieux mauvais plaisants pour voir si je réagirais (genre "Mazinger Fulchibar Chirac" et des âneries dans le genre, ou des considérations sur la bite à Tourriol, et j'en passe et des meilleures). Et puis, j'ai déjà repéré des requêtes google concernant les vieux articles perdus dans le naufrage de l'ancienne version de superpouvoir.com, requêtes récurrentes qui ressemblent bien à des demandes de remise en ligne. La plus récente, assez insistante, concernait un vieux truc que j'avais écrit à propos de Patlabor 3, et particulièrement des bonus qui étaient fournis avec le DVD.





Les lieux de l'action

Avec un peu de retard, je viens de me procurer Patlabor 3 (NdA : je précise que l'article date de 2005) qui, comme son nom l'indique, est le troisième long métrage consacré à la police mobile robotisée du futur. Venant à la suite de deux très bons opus (opii, non, en bon latin ? je sais plus) réalisés par Oshii (non, ce n'est pas le pluriel d'oshus), celui-ci m'inquiétait un peu de prime abord : sans le maître, arriverait-il à se hisser au niveau des deux petits bijoux qui l'avaient précédé ?

Eh bien le pari est plutôt gagné. Conservant une part de cette froideur esthétisante qui faisait l'élégance des deux précédents, navigant dans mes mêmes eaux troubles et paranoïdes tout en se démarquant de ses prédécesseurs par certains points, il arrive à tenir la route, explorant les recoins de cet univers tourné vers le réalisme.


Ça déconne pas. Enfin, pas encore.

Première surprise, ici, la Division des Véhicules Spéciaux, théoriquement au coeur de la série, n'est que peu présente. Si l'on retrouve Goto, Ohta et Izumi, ils ne sont là que pour prêter main forte en dernier recours à deux inspecteurs de la criminelle qui enquêtent sur de mystérieux incidents impliquant des labors (astucieuse dénomination évitant le terme robot trop galvaudé tout en en conservant tout à fait le sens). À mesure de l'avancée de l'enquête, nos inspecteurs découvrent un complot militaire impliquant de sales bidouilles génétiques. Mais ce complot lui-même n'est pas le problème principal : quelqu'un a profité des recherches secrètes pour aller au bout de sa propre folie...

Et la folie est au coeur de toute la série : folie de Hoba, qui avant de mourir, lance un plan démoniaque dont il sait qu'il ne verra pas la réalisation (Patlabor 1), folie de Tsuge, qui, en butte aux contradictions entre le politique et le militaire, finit par les imposer à la nation entière, pour voir si elle arrivera à les résoudre (Patlabor 2), et à présent folie de Mizaki enfin, qui tente de recréer ce qu'elle a pourtant perdu à tout jamais. Les méchants de la série font à chaque fois montre d'une folie qui contamine le réel, qui s'oppose à la réalité terre à terre des mécanos qui entretiennent les labors et des flics qui les utilisent.

Si cet épisode de Patlabor se termine d'une façon quelque peu décevante en combat contre un gros godzistreum baveux, son développement est dans la continuité des autres : longue enquête policière, traitée avec un réalisme presque fastidieux, celui du terrain, des interrogatoires, des fausses pistes, des informations qu'on finit par croiser, parfois trop tard. Le tandem classique du vieux flic fataliste et du jeune fonceur fonctionne à fond. Les amateurs apprécieront la scène où le vieux rencontre un informateur dans un endroit discret, cet informateur n'étant autre... Que Goto, inversion des rôles bienvenue, Goto ayant lui aussi tendance à recourir à des informateurs louches dans des lieux tranquilles.


Méfiez-vous des imitations

Mais le point fort du double DVD Patlabor 3, ce n'est pas forcément le film, sombre comme on aime et de bonne tenue, mais le bonus totalement aberrant qui occupe la seconde galette : Minipato. On savait qu'Oshii était complètement fou. On le savait. On le savait depuis Avalon, depuis Patlabor 2 (présenter de façon contemplative au public japonais un coup d'état militaire en plein Tokyo, c'était gonflé quand on connait l'histoire du pays : ces images d'occupation par les chars ont une véritable shock value toute en finesse), on le savait même depuis Angel's Egg.


Non parce que c'est vrai, quoi : sans les petites mains, pas de baston finale en mécha !

Mais là... C'est pire. Oshii fait mumuse avec la 3D, dans une série totalement parodique reprenant les persos de la série Patlabor, mais avec une approche qui évoquerait presque South Park. Les persos sont des marionnettes plates à l'animation minimale et les histoires sont... Comment dire... Différentes, pas pareilles, autres... Entre un cours magistral sur les armes à feu dispensé par Goto et Ohta (avec une intro digne de Magnum Force), une apologie du dur labeur des mécanos mal aimés et un rapport de Shinobu expliquant comment Goto a réussi à contourner les restrictions budgétaires en se lançant dans la pêche à grande échelle au poisson hallucinogène (en détournant à cet effet une vedette de patrouille reconvertie dans la pêche à l'explosif), on sort quand même pas mal de l'ambiance parano des trois films (même si elle est évoquée de façon très fine dans l'épisode sur la pêche, via d'hilarants clins d'oeil visuels à Patlabor 2). Le tout oscillant entre l'hommage et le dynamitage. Et derrière, on sent une vraie maitrise technique, même si elle est mise au service d'une pochade délirante, histoire de montrer qu'en matière d'anime, Oshii reste un sacré boss). Le résultat est vivement recommandé par de grandes marques de Nikolavitch, en tout cas.

Bon, vous me direz que Patlabor c'est pas que ça, qu'il y a eu le manga, la série animée et les OAV, mais faute de budget, j'ai pas encore mis la main dessus (à part quelques épisodes assez marrants du manga). Si une âme charitable parmi vous veut m'offrir tout ça...

Commentaires

Même si je trouve ça très chouette que des gens fassent des requêtes Google sur ma bite, je m'étonne quand même de les voir atterrir chez toi. Enfin... tant que c'est pas la chatte de ma femme, ça va.
Zaïtchick a dit…
Ce qui m'ennuie, c'est quand j'achète un film avec un robot et un streum, j'aimerais bien voir, à un moment, un robot et un streum qui se frittent. Sinon, c'est très bien foutu.

Posts les plus consultés de ce blog

Back to back

 Et je sors d'une nouvelle panne de réseau, plus de 15 jours cette fois-ci. Il y a un moment où ça finit par torpiller le travail, l'écriture d'articles demandant à vérifier des référence, certaines traductions où il faut vérifier des citations, etc. Dans ce cas, plutôt que de glander, j'en profite pour avancer sur des projets moins dépendants de ma connexion, comme Mitan n°3, pour écrire une nouvelle à la volée, ou pour mettre de l'ordre dans de vieux trucs. Là, par exemple, j'ai ressorti tout plein de vieux scénarios de BD inédits. Certains demandaient à être complétés, c'est comme ça que j'ai fait un choix radical et terminé un script sur François Villon que je me traîne depuis des années parce que je ne parvenais pas à débusquer un élément précis dans la documentation, et du coup je l'ai bouclé en quelques jours. D'autres demandaient un coup de dépoussiérage, mais sont terminés depuis un bail et n'ont jamais trouvé de dessinateur ou d

Le Messie de Dune saga l'autre

Hop, suite de l'article de l'autre jour sur Dune. Là encore, j'ai un petit peu remanié l'article original publié il y a trois ans. Je ne sais pas si vous avez vu l'argumentaire des "interquelles" (oui, c'est le terme qu'ils emploient) de Kevin J. En Personne, l'Attila de la littérature science-fictive. Il y a un proverbe qui parle de nains juchés sur les épaules de géants, mais l'expression implique que les nains voient plus loin, du coup, que les géants sur lesquels ils se juchent. Alors que Kevin J., non. Il monte sur les épaules d'un géant, mais ce n'est pas pour regarder plus loin, c'est pour regarder par terre. C'est triste, je trouve. Donc, voyons l'argumentaire de Paul le Prophète, l'histoire secrète entre Dune et le Messie de Dune. Et l'argumentaire pose cette question taraudante : dans Dune, Paul est un jeune et gentil idéaliste qui combat des méchants affreux. Dans Le Messie de Dune, il est d

L'Empereur-Dieu de Dune saga l'autre

Hop, suite et fin des redifs à propos de Dune. Si jamais je me fends d'un "les hérétiques", ce sera de l'inédit. Le précédent épisode de notre grande série sur la série de Frank Herbert avait évoqué l'aspect manipulatoire de la narration dans  Dune , cette façon d'arriver à créer dans l'esprit du lecteur des motifs qui ne sont pas dans le texte initial. La manipulation est patente dans le domaine du mysticisme. Demandez à dix lecteurs de  Dune  si  Dune  est une série mystique, au moins neuf vous répondront "oui" sans ambage, considérant que ça va de soi. Il y a même des bonnes sœurs. C'est à s'y tromper, forcément. Et, un fois encore, le vieil Herbert (on oubliera charitablement le jeune Herbert et son sbire Kevin J. en personne) les aura roulés dans la farine. Dune  est une série dont l'aspect mystique est une illusion habile, un savant effet de manche. Certains personnages de la série sont mystiques. Certaines

Hail to the Tao Te King, baby !

Dernièrement, dans l'article sur les Super Saiyan Irlandais , j'avais évoqué au passage, parmi les sources mythiques de Dragon Ball , le Voyage en Occident (ou Pérégrination vers l'Ouest ) (ou Pèlerinage au Couchant ) (ou Légende du Roi des Singes ) (faudrait qu'ils se mettent d'accord sur la traduction du titre de ce truc. C'est comme si le même personnage, chez nous, s'appelait Glouton, Serval ou Wolverine suivant les tra…) (…) (…Wait…). Ce titre, énigmatique (sauf quand il est remplacé par le plus banal «  Légende du Roi des Singes  »), est peut-être une référence à Lao Tseu. (vous savez, celui de Tintin et le Lotus Bleu , « alors je vais vous couper la tête », tout ça).    C'est à perdre la tête, quand on y pense. Car Lao Tseu, après une vie de méditation face à la folie du monde et des hommes, enfourcha un jour un buffle qui ne lui avait rien demandé et s'en fut vers l'Ouest, et on ne l'a plus jamais revu. En chemin,

Vlad Tepes, dit Dracula

" Vous allez vous manger entre vous. Ou bien partir lutter contre les Turcs. " (Dracula, 1430 -1476) Dracula... Le surnom du prince des Valaques est devenu au fil du temps synonyme d'horreur et de canines pointues, principalement sous l'impulsion d'un écrivain irlandais, Bram Stoker, qui le dégrada d'ailleurs au point de le faire passer pour un comte, un bien triste destin pour un voïévode qui fit trembler l'empire qui faisait trembler l'Europe chrétienne. Tout se serait pourtant bien passé s'il n'avait pas été élevé à la cour du Sultan, comme cela se pratiquait à l'époque. En effet, il fut avec son demi-frère Radu otage des Turcs, afin de garantir la coopération de la famille, son père Vlad Dracul étant devenu par la force des choses le fantoche de l'envahisseur (le père se révolta pourtant et y laissa la vie. Mircea, le grand-frère, tenta le coup à son tour avec le même résultat. il est intéressant de noter que les otages

Le super-saiyan irlandais

Il y a déjà eu, je crois, des commentateurs pour rapprocher le début de la saga Dragonball d'un célèbre roman chinois, le Voyage en Occident (ou Pérégrination vers l'Ouest ) source principale de la légende du roi des singes (ou du singe de pierre) (faudrait que les traducteurs du chinois se mettent d'accord, un de ces quatre). D'ailleurs, le héros des premiers Dragonball , Son Goku, tire son nom du singe présent dans le roman (en Jap, bien sûr, sinon c'est Sun Wu Kong) (et là, y aurait un parallèle à faire avec le « Roi Kong », mais c'est pas le propos du jour), et Toriyama, l'auteur du manga, ne s'est jamais caché de la référence (qu'il avait peut-être été piocher chez Tezuka, auteur en son temps d'une Légende de Songoku ).    Le roi des singes, encore en toute innocence. Mais l'histoire est connue : rapidement, le côté initiatique des aventures du jeune Son Goku disparaît, après l'apparition du premier dr

Banzaï, comme disent les sioux dans les films de cape et d'épée

Hop, pour bien finir le mois, un petit coup de Crusades, tome 3 (non, on n'a pas encore déterminé le titre de l'épisode à ce stade). C'est toujours écrit par Nikolavitch (moi), Izu (lui) et dessiné par Zhang Xiaoyu (l'autre*). *je dis l'autre, parce qu'il existe aussi une Zhang Xiaoyu qui est un genre de star de l'internet en Chine pour des raisons de photos dévêtues, si j'ai bien tout compris)

Super-traumas de destruction massive

On le sait tous, pour peu qu'on ait un peu mis le nez dans les illustrés racontant les aventures de l'un ou l'autre super-slip combattant au nom de la vérité, de la justice ou de quoi que ce soit du même genre : leur origine est généralement lié à un traumatisme personnel plus qu'à l'obtention des pouvoirs. Pas de Spider-man s'interrogeant sur ses responsabilité sans la mort de l'Oncle Ben. Pas de Batman en croisade, sacrifiant sa vie dorée de milliardaire à une guerre sans fin sans l'agression subie par Thomas et Martha Wayne. Pas de Billy Butcher sans le viol de Rebecca et ses conséquences. (oui, bon, Butcher n'est pas exactement un super-héros, je sais). Pas de Docteur Strange sans la perte de sa dextérité de chirurgien qui l'a conduit à chercher des solutions drastiques et irrationnelles et à se remettre totalement en question sur le plan personnel. Pas de Wolverine en quête de lui-même sans les tripatouillages du projet

Magic Steve

« Par les hordes hurlantes d'Hoggoth et les mille lunes de Munoporr ! » Et dans un déluge psychédélique d'effets lumineux, le Docteur Strange se débarrasse d'une meute de goules gargantuesques. Puis il rentre dans son sanctuaire de Greenwich Village et le fidèle Wong lui prépare un bon thé vert qui draine bien partout où il le faut, parce qu'il faut garder la forme, n'est-ce pas.   Mais si l'on interrogeait un spécialiste des arts magiques (au pif, Alan Moore, qui de surcroît ne s'est à ma connaissance jamais exprimé sur Doctor Strange , c'est bien, je peux lui faire dire à peu près ce que je veux, du coup), il risque de nous répondre avec un ricanement amusé et très légèrement narquois (en ce qui concerne Alan Moore et ce qu'il pense des mages fictifs, vous pourrez avec profit vous reporter à ses déclarations concernant Harry Potter , et au sort qu'il fait subir à Harry dans le dernier tome de Century ). Et il aurait d'ailleurs raison.

Nietzsche et les surhommes de papier

« Il y aura toujours des monstres. Mais je n'ai pas besoin d'en devenir un pour les combattre. » (Batman) Le premier des super-héros est, et reste, Superman. La coïncidence (intentionnelle ou non, c'est un autre débat) de nom en a fait dans l'esprit de beaucoup un avatar du Surhomme décrit par Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra . C'est devenu un lieu commun de faire de Superman l'incarnation de l' Übermensch , et c'est par là même un moyen facile de dénigrer le super-héros, de le renvoyer à une forme de l'imaginaire maladive et entachée par la mystique des Nazis, quand bien même Goebbels y voyait un Juif dont le S sur la poitrine signifiait le Dollar. Le super-héros devient, dans cette logique, un genre de fasciste en collants, un fantasme, une incarnation de la « volonté de puissance ».   Le surhomme comme héritier de l'Hercule de foire.   Ce n'est pas forcément toujours faux, mais c'est tout à fait réducteu