Accéder au contenu principal

The sound of Seznec

Ce matin, j'étais sur Paris. J'avais des boulots à rendre, et puis j'en ai profité pour me reprendre une paire de bottes, parce que bon.

Et dans le métro, il y avait des grandes affiches 4x3 pour la nouvelle superproduction historique de Robert Hossein. Bon, il y avait aussi d'immenses affiches 4x3 pour un concert à Bercy d'un certain Michael Bublé, dont j'ignore totalement ce qu'il chante, ce qui fait que bon, je ne vais pas en parler, je note juste que la pub, dans ces conditions, s'apparente à ce qu'on appelle "bruit" en théorie de l'information. Le "signal". est perdu, le message est non signifiant. Alors que Robert Hossein, je connais. Il a fait du chemin depuis qu'il jouait l'ignoble commissaire Rosen dans Le professionnel. Maintenant (bon, depuis une bonne vingtaine d'années, si ce n'est plus, j'ai perdu le compte), il se refait des grandes controverses historiques. Fallait-il couper la tête à Jeanne D'Arc, brûler Marie-Antoinette, affranchir le courrier de Lyon, tout ça. Vous avez dû être exposé à ces trucs, depuis le temps. Bon.

Maintenant, il se refait l'affaire Seznec. Et là, je trouve ça intéressant. Parce que l'idée, dans tous ces spectacles, c'est justement "laissons le spectateur se faire son idée". Le problème, c'est que sur une affaire comme celle-la, le débat est irrémédiablement pollué. Vu que, depuis plus de trois quarts de siècles, on n'en parle que pour dénoncer une possible erreur judiciaire (je ne connais pas bien le dossier, moi, je ne me prononcerai pas sur le fond) l'opinion est forcément biaisée. S'il n'y avait pas eu ce doute persistant, ce combat de la famille, ces déclarations, il n'y aurait plus d'affaire Seznec. Ce serait une vieille histoire oubliée, on n'en parlerait plus, et a fortiori, on n'en ferait pas un spectacle. Le spectateur vient donc avec en tête, au moins au niveau subliminal, "Seznec innocent". Ça brouille passablement le concept.

Une station de métro plus loin, il y avait une affiche immense, colorée et guillerette (signée Pierre et Gilles, quand même) pour une comédie musicale tirée de La Mélodie du Bonheur. Et là, on se dit qu'il y a gourance, en fait. Il aurait fallu faire une affiche colorée et guillerette à la Pierre et Gilles pour une comédie musicale sur l'affaire Seznec, et un spectacle "faites-vous votre idée avec Robert Hossein" de la Mélodie du Bonheur. Là, ça aurait été marrant. Hossein en narrateur tonitruant : "L'Anschluss ! Fallait-il réunifier le monde germanique sous les talons des bottes nazies ? Exposons tous les arguments ! Voici Franck de la Personne déguisé en Eric Besson qui incarnera pour vous le chancelier allemand et va tenter de vous convaincre".

Ça, ça aurait été couillu.

Commentaires

artemus dada a dit…
"Une station de métro plus loin, il y avait une affiche immense, colorée et guillerette (signée Pierre et Gilles, quand même)"

Ah! Tiens ?!
Il y a eu de l'eau dans le gaz, Pierre n'est plus avec Vacances. Ah, l'amour ça vient ça va tu me diras mais de là à en faire une affiche.
Anonyme a dit…
Hm, judicieux comme casting: Frank de la Personne en Besson. pas forcément plaisant, comme rôle, mais physiquement, y a quelque chose. D'après ce que je sais, dans la reprise de La Mélodie du Bonheur, y a des montagnes et des prairies jusque dans la salle à manger des Von Trapp. Et je dis: "Kitsch? Le kitsch, il a bon dos".

(En fait, je pourrais même le chanter) O_____O
Alex Nikolavitch a dit…
oui, toi aussi, cet air est gravé au fer rouge dans ta tête, et même un traitement à la paille de fer n'a pas réussi à l'effacer ?
JayWicky a dit…
Michael Bublé dispose d'un effrayant superpouvoir : celui de faire regretter l'époque où Claude Moine ou Jean-Philippe Smet devaient se faire chier à trouver un pseudo. Et faut le faire, quand même.

Quand à cette affiche de la Mélodie du Bonheur, oui, moi aussi je l'ai vue. Merci de me le rappeller parce que c'est surtout le nom de l'actrice que je voulais trouver. Ainsi c'est du Pierre et Gilles ? Très soft, pour eux. Ou alors c'est que leur style a suffisamment fait école pour qu'on croit avoir affaire à leurs suiveurs quand ils ne sortent pas la grosse artillerie.
Anonyme a dit…
C'est un air absolument inoubliable. Ceci dit, ça ne me dérange pas, j'aime la comédie musicale, moi. Et n'oublions pas que, passé la première moitié un peu sirupeuse (bien que les chansons soient plutôt réussies), on arrive quand même à une partie plus dramatique avec les salopiots de Nazis. "Those swines!"

Comédie, c'est juste le terme français, quoi.

Et ça place La mélodie du bonheur à mille coudées au-dessus des comédies mus... pardon, des opéras-rock français récents, du genre Mozart (pardon, Wolfie, ils sont pas méchants, ils sont juste débiles), profonds comme une diffusion de La nouvelle star.
Anonyme a dit…
Ouh, con! Je poste un message sur Mozart, et le mot de confirmation qu'on me demande, c'est kyrie. À la limite, ça fout la trouille.
Alex Nikolavitch a dit…
ah ouais, jolie, le coup de la kyrie. alors que l'opéra rock mozart, c'est plutôt kyrie le clown, en effet.

Mais bon, pour reprendre une alternative bien connue, si on me donne le choix entre La Mélodie du Bonheur en boucle pour l'éternité et le fait d'empêcher la victoire définitive des forces du Bien*, j'opte sans hésiter pour la seconde solution.


*je me suis laissé dire que tu avais entendu parler de cette histoire

Posts les plus consultés de ce blog

Défense d'afficher

 J'ai jamais été tellement lecteur des Defenders de Marvel. Je ne sais pas trop pourquoi, d'ailleurs. J'aime bien une partie des personnages, au premier chef Hulk, dont je cause souvent ici, ou Doctor Strange, mais... mais ça s'est pas trouvé comme ça. On peut pas tout lire non plus. Et puis le concept, plus jeune, m'avait semblé assez fumeux. De fait, j'ai toujours plus apprécié les Fantastic Four ou les X-Men, la réunion des personnages ayant quelque chose de moins artificiel que des groupes fourre-tout comme les Avengers, la JLA ou surtout les Defenders.   Pourtant, divers potes lecteurs de comics m'avaient dit aimer le côté foutraque du titre, à sa grande époque.   Pourtant, ces derniers temps, je me suis aperçu que j'avais quelques trucs dans mes étagères, et puis j'ai pris un album plus récent, et je m'aperçois que tout ça se lit ou se relit sans déplaisir, que c'est quand même assez sympa et bourré d'idées.   Last Defenders , de J

Nettoyage de printemps

 Il y a plein de moyens de buter sur un obstacle lorsqu'on écrit. Parfois, on ne sait pas comment continuer, on a l'impression de s'être foutu dans une impasse. C'est à cause de problèmes du genre qu'il m'arrive d'écrire dans le désordre : si je cale à un endroit, je reprends le récit plus tard, sur un événement dont je sais qu'il doit arriver, ce qui me permet de solidifier la suite, puis de revenir en arrière et de corriger les passages problématiques jusqu'à créer le pont manquant.  D'autres tiennent à des mauvais choix antérieurs. Là, il faut aussi repartir en arrière, virer ce qui cloche, replâtrer puis repartir de l'avant. Souvent, ça ne tient qu'à quelques paragraphes. Il s'agit de supprimer l'élément litigieux et de trouver par quoi le remplacer qui ne représente pas une contrainte pour le reste du récit. Pas praticable tout le temps, ceci dit : j'en parlais dernièrement, mais dès lors qu'on est dans le cadre d'

Perceval sort du bois

 C'est fin mai que sortira Le garçon avait grandi en un gast pays , mon prochain roman aux Moutons électriques . Les plus attentifs d'entre vous, en voyant ce titre alittérant et à rallonge, se doutent qu'il fait suite à Trois coracles cinglaient vers le couchant et à L'ancelot avançait en armes . Le premier tome était sorti il y a cinq ans, quand même, ça ne nous rajeunit pas. Cette sortie ira de pair avec une réimpression des deux autres. L'ancelot bénéficiera d'une nouvelle couverture, toujours par l'excellent Melchior Ascaride, qui s'y entend à emballer mes bouquins comme ceux des collègues. Comme vous vous en doutez aussi, je termine avec Perceval, personnage fascinant (je lui avais déjà consacré un petit récit dans un pocket de chez Semic, y a plus de vingt ans) mais sans doute le plus difficile à manier de tout le bestiaire arthurien. Le résumé : Élevé à l’abri des tourments et d’un monde violent, le jeune Perceval tient pourtant à le découvr

Le Messie de Dune saga l'autre

Hop, suite de l'article de l'autre jour sur Dune. Là encore, j'ai un petit peu remanié l'article original publié il y a trois ans. Je ne sais pas si vous avez vu l'argumentaire des "interquelles" (oui, c'est le terme qu'ils emploient) de Kevin J. En Personne, l'Attila de la littérature science-fictive. Il y a un proverbe qui parle de nains juchés sur les épaules de géants, mais l'expression implique que les nains voient plus loin, du coup, que les géants sur lesquels ils se juchent. Alors que Kevin J., non. Il monte sur les épaules d'un géant, mais ce n'est pas pour regarder plus loin, c'est pour regarder par terre. C'est triste, je trouve. Donc, voyons l'argumentaire de Paul le Prophète, l'histoire secrète entre Dune et le Messie de Dune. Et l'argumentaire pose cette question taraudante : dans Dune, Paul est un jeune et gentil idéaliste qui combat des méchants affreux. Dans Le Messie de Dune, il est d

Pourri Road

Un peu hypé par le prequel à venir de Mad Max : Fury Road, consacré à la jeunesse de Furiosa. Après avoir fait de son héros un spectateur des choses, presque un spectre de choeur grec, Miller poursuit la déconstruction de Max au point de le faire carrément disparaître de sa propre saga. C'est gonflé, mais pas complètement surprenant de sa part, quand on y réfléchit. Mad Max, à l'époque des débuts de la série, c'était un avenir crédible. Une société en décomposition qui finit par imploser, et un retour à la barbarie, celui que nous prédisait Robert E. Howard il y a un poil moins d'un siècle. Max, c'est un peu un Conan post-moderne, ou un Solomon Kane qui aurait fini par baisser les bras et sombrer dans la désillusion. Les années 70 étaient passé par là, et la trilogie initiale consacrée à Max le fou est devenue un élément culturel fort des années 80, à l'influence importante. Les tensions qu'on devinait étaient appelées à se résoudre. Le Dôme du Tonnerre, pui

Sonja la rousse, Sonja belle et farouche, ta vie a le goût d'aventure

 Je m'avise que ça fait bien des lunes que je ne m'étais pas penché sur une adaptation de Robert E. Howard au cinoche. Peut-être est-ce à cause du décès de Frank Thorne, que j'évoquais dernièrement chez Jonah J. Monsieur Bruce , ou parce que j'ai lu ou relu pas mal d'histoires de Sonja, j'en causais par exemple en juillet dernier , ou bien parce que quelqu'un a évoqué la bande-son d'Ennio Morricone, mais j'ai enfin vu Red Sonja , le film, sorti sous nos latitudes sous le titre Kalidor, la légende du talisman .   On va parler de ça, aujourd'hui Sortant d'une période de rush en termes de boulot, réfléchissant depuis la sortie de ma vidéo sur le slip en fourrure de Conan à comment lui donner une suite consacrée au bikini en fer de Sonja, j'ai fini par redescendre dans les enfers cinématographiques des adaptations howardiennes. Celle-ci a un statut tout particulier, puisque Red Sonja n'est pas à proprement parler une création de Robert H

Serial writer

Parmi les râleries qui agitent parfois le petit (micro) milieu de l'imaginaire littéraire français, y a un truc dont je me suis pas mêlé, parce qu'une fois encore, je trouve le débat mal posé. Je suis capable d'être très casse-burette sur la manière de poser les débats. Mal poser un débat, c'est ravaler l'homme bien plus bas que la bête, au niveau d'un intervenant Céniouze. On n'en était certes pas là, et de loin, mais les esprits s'enflamment si vite, de nos jours.   Du coup, c'est ici que je vais développer mon point de vue. Déjà parce que c'est plus cosy, y a plus la place, déjà, que sur des posts de réseaux sociaux, je peux prendre le temps de peser le moindre bout de virgule, et puis peut-être aussi (c'est même la raison principale, en vrai) je suis d'une parfaite lâcheté et le potentiel de bagarre est moindre. Bref. Le sujet de fâcherie qui ressurgit avec régularité c'est (je synthétise, paraphrase et amalgame à donf) : "Po

Archie

 Retour à des rêves architecturaux, ces derniers temps. Universités monstrueuses au modernisme écrasant (une réminiscence, peut-être, de ma visite de celle de Bielefeld, il y a très longtemps et qui a l'air d'avoir pas mal changé depuis, si j'en crois les photos que j'ai été consulter pour vérifier si ça correspondait, peut-être était-ce le temps gris de ce jour-là mais cela m'avait semblé bien plus étouffants que ça ne l'est), centres commerciaux tentaculaires, aux escalators démesurés, arrière-lieux labyrinthiques, que ce soient caves, couloirs de service, galeries parcourues de tuyauteries et de câblages qu'on diraient conçues par un Ron Cobb sous amphétamines. J'erre là-dedans, en cherchant Dieu seul sait quoi. Ça m'a l'air important sur le moment, mais cet objectif de quête se dissipe avant même mon réveil. J'y croise des gens que je connais en vrai, d'autres que je ne connais qu'en rêve et qui me semblent des synthèses chimériqu

Nietzsche et les surhommes de papier

« Il y aura toujours des monstres. Mais je n'ai pas besoin d'en devenir un pour les combattre. » (Batman) Le premier des super-héros est, et reste, Superman. La coïncidence (intentionnelle ou non, c'est un autre débat) de nom en a fait dans l'esprit de beaucoup un avatar du Surhomme décrit par Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra . C'est devenu un lieu commun de faire de Superman l'incarnation de l' Übermensch , et c'est par là même un moyen facile de dénigrer le super-héros, de le renvoyer à une forme de l'imaginaire maladive et entachée par la mystique des Nazis, quand bien même Goebbels y voyait un Juif dont le S sur la poitrine signifiait le Dollar. Le super-héros devient, dans cette logique, un genre de fasciste en collants, un fantasme, une incarnation de la « volonté de puissance ».   Le surhomme comme héritier de l'Hercule de foire.   Ce n'est pas forcément toujours faux, mais c'est tout à fait réducteu

Le super-saiyan irlandais

Il y a déjà eu, je crois, des commentateurs pour rapprocher le début de la saga Dragonball d'un célèbre roman chinois, le Voyage en Occident (ou Pérégrination vers l'Ouest ) source principale de la légende du roi des singes (ou du singe de pierre) (faudrait que les traducteurs du chinois se mettent d'accord, un de ces quatre). D'ailleurs, le héros des premiers Dragonball , Son Goku, tire son nom du singe présent dans le roman (en Jap, bien sûr, sinon c'est Sun Wu Kong) (et là, y aurait un parallèle à faire avec le « Roi Kong », mais c'est pas le propos du jour), et Toriyama, l'auteur du manga, ne s'est jamais caché de la référence (qu'il avait peut-être été piocher chez Tezuka, auteur en son temps d'une Légende de Songoku ).    Le roi des singes, encore en toute innocence. Mais l'histoire est connue : rapidement, le côté initiatique des aventures du jeune Son Goku disparaît, après l'apparition du premier dr